• Un ésotérisme que l’on dit chrétien


    « L’Église en effet croit des choses vraies et elle croit qu’elle croit des choses vraies (en effet, c’est par la foi
    que l’on croit la vérité même de la foi), parce qu’elle croit des choses vraies, elle enseigne des choses vraies et
    parce qu’elle enseigne des choses vraies, elle offre aux croyants le véritable fondement de la dignité de la
    personne humaine.
    « Assurément, les erreurs envahissent le monde, règnent sur lui. Est-ce que par hasard ceux qui se
    trompent sont des gens qui se trompent pour ainsi dire toujours invinciblement, tous d’une parfaite bonne
    foi, tous victorieux de leurs passions, tous exempts d’orgueil, de colère, de luxure, tous se tendant, aspirant,
    se pressant avec une vertu plus qu’angélique, vers la seule vérité intelligible, de toutes leurs forces ?
    « Comme s’il n’existait pas d’hommes pervers et pernicieux qui, non pas par faiblesse d’intelligence, mais
    par malice proprement dite, embrassent les erreurs et s’en font les champions. Comme s’ils étaient de
    bonne foi tous ces propagateurs de l’erreur ! »
    Abbé Victor-Alain Berto 1
    Les années 1978 et 1979 ont vu la publication de trois ouvrages offrant de surprenantes
    convergences. Ils sont l’oeuvre de trois auteurs qui s’affirment catholiques. Ces auteurs se
    connaissent personnellement, s’estiment mutuellement et s’appuient l’un sur l’autre en même
    temps qu’ils ne cessent de faire d’innombrables références à des penseurs défendant la notion de
    l’unité transcendante des religions : René Guénon, Frithjof Schuon, A. K. Coomaraswamy, Titus
    Bruckhardt, Léo Schaya… pour s en tenir aux plus connus 2. À partir d’eux, on peut rejoindre, de
    proche en proche, plusieurs des grands courants anticatholiques contemporains et jusqu’à la
    Franc-maçonnerie et la nouvelle Gnose d’inspiration pseudo-scientifique, avec Raymond Ruyer 3,
    ou protestante, avec Xavier Sallantin 4.
    1 Schémas d’interventions au concile Vatican II : Remarques sur le ch. V De oecumenismo ; et De la fausse notion de
    liberté religieuse. Repris dans le recueil posthume Pour la Suinte Église Romaine, Paris, Éd. du Cèdre, 1976 pp. 395, 404
    et 406.
    2 Ces auteurs parsèment leurs livres de références empruntées à toutes les autres religions, ces références venant se
    mêler continuellement à des références spécifiquement catholiques mais en excluant toutefois de ces dernières, et
    d’une manière quasi totale, toute allusion au Magistère proprement dit.
    3 Raymond Ruyer, professeur à l’Université de Nancy. A publié de nombreux ouvrages sur la philosophie des
    sciences et la cybernétique. En 1974, il publie, chez Fayard, un livre retentissant : La Gnose de Princeton – Des savants à
    recherche d’une religion. Cette « nouvelle gnose » a pris naissance vers 1969, aux u.s.a., à l’Université de Princeton, à
    Pasadena, dans les milieux scientifiques de physiciens, d’astronomes cosmologistes et de biologistes ; « elle a gagné des
    membres de la haute administration, ainsi que de la haute Église » – « Elle se veut religieuse dans son esprit, tout en
    restant strictement scientifique. » – « Elle exige, pour être comprise, un certain retournement de nos schémas mentaux
    habituels. » Jean Borella et François Chénique ne cachent pas l’estime en laquelle ils tiennent l’oeuvre du professeur
    Ruyer. Ce Ruyer, chose remarquable, est aussi l’une des références de choix des groupes parallèles « Nouvelle École »
    (Alain de Benoist) et g.r.e.c.e. La Nouvelle Gnose est une Franc-maçonnerie sans rites ni cérémonie d’intronisation,
    un stoïcisme ou un épicurisme sans recettes morales, mais où chacun met à l’essai, pour lui et les autres, ses formules
    d’attitudes ou de comportements, ses montages expérimentaux, la Règle efficace se dégageant peu à peu les essais et
    des erreurs de bonne foi. » (p. 13).
    4 Xavier Sallantin : officier supérieur de l’Armée française. Dirige à Paris la « Cellule de recherches praxéologiques »
    de l’institut des Hautes Études de Défense Nationale, place Joffre. Logicien, épistémologue, il tient la francmaçonnerie
    pour une chose surannée et quelque peu ridicule. Il estime que ses travaux commencent là où s’achève
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    Voici ces trois ouvrages :
    – François Chénique : Le Yoga spirituel de saint François d’Assise. Symbolisme du Cantique des
    créatures. (Dervy-Livres, Paris, 1978 ; 120 pp.)
    – Jean Borella : La Charité profanée. Subversion de l’âme chrétienne. (Éd. du Cèdre, Paris, 1979
    438 pp.) (Édition incomplète par rapport au manuscrit original) ;
    – Abbé Henri Stéphane : Introduction à l’ésotérisme chrétien. (Dervy-Livres, Paris, 1979 ; 400 pp.)
    (Édition incomplète par rapport au manuscrit original.).
    Si les livres de François Chénique et de l’abbé Stéphane sont passés à peu près inaperçus du côté
    catholique, il n’en est pas de même de l’ouvrage de Jean Borella sur lequel est tombé comme une
    pluie de louanges. Voici que des ouvrages véhiculant des notions ésotériques et manifestant
    d’inquiétantes collusions avec la Maçonnerie ou les « nouveaux gnostiques » sont introduits,
    couverts d’éloges, dans les rangs de ceux qui s’affirment « catholiques fidèles ». On a même pu voir
    le livre de Borella exposé à la vente dans des écoles et centres catholiques traditionnels et distribué
    gratuitement aux Séminaristes d’Ecône-Albano.
    Louis Salleron, dans Itinéraires (juin 1979, p. 212) va jusqu’à écrire : « Il [Jean Borella] ne refuse
    même pas certaines intuitions ou formulations d’ésotéristes de la Tradition (expression ici
    pléonastique montrant que Louis Salleron ne sait nullement de quoi il est question – ndlr), tels
    que Guénon ou Schuon. »
    Un peu plus loin, il note que, de la sorte, l’auteur a toute liberté pour « ajouter au vrai essentiel que
    lui fournissent la théologie classique et la philosophia perennis toutes les vérités secondaires qu’il
    trouve aux frontières de l’orthodoxie catholique ».
    On voit bien que, par de tels propos, c’est Louis Salleron lui-même qui semble avoir déjà franchi
    ces frontières-là. La méprise ne peut être pire ; Louis Salleron ne sait visiblement pas ce que
    représentent Guénon ou Schuon, non plus que les termes de Tradition et de philosophia perennis
    sous la plume de ces auteurs.
    Marcel De Corte, dans le même numéro de la même revue, entend bien n’être pas à la traîne et il
    salue ce livre comme l’un des plus importants de ces dernières décennies (notons, au passage, que
    c’est là un éloge plutôt creux en une époque où les éditeurs inondent le public d’un fatras de livres
    inutiles ou funestes, dérisoires ou illisibles). Malgré son éméritat, Marcel De Corte se méprend
    aussi sur le vocable de Tradition (lequel, pour un ésotériste, s’entend dans le sens de l’unité
    transcendante des religions – cf. ci-dessous), tandis qu’il avoue ne pas savoir le pourquoi (si évident
    pour qui a quelque peu fréquenté René Guénon) de l’emploi répété du terme métaphysique là où
    « on ne peut plus guère le distinguer du mot théologique » (p. 218).
    Dans La Pensée catholique (n° 180, mai-juin 1979), un dominicain, le Père René Spitz, et un
    capucin, le Père Philibert de Saint-Didier, encensent cette « somme théologique de la charité »
    sans même s’apercevoir des béquilles aussi flagrantes. Il est vrai que cette revue affiche désormais
    les positions les plus contradictoires – nous ne sommes plus au temps du cher abbé Berto.
    l’oeuvre d’un autre polytechnicien, Raymond Abellio. Sallantin a fondé à Béna, près de Saillagouse (Pyrénées
    Orientales), une Association Béna qui se donne comme « Base d’épistémologie naturelle ». Cette association « entend
    contribuer… à l’élaboration de la Théorie du Sens et à ses applications. » Il est impossible d’exposer ici, même en
    quelques lignes, cette théorie nouvelle. Outre des études stratégiques (dans la Revue de Défense Nationale), Xavier
    Sallantin est l’auteur de nombreux documents circulant sous forme ronéotypée dans de petits cercles d’intellectuels.
    Cette tentative de formalisation logistique s’est attaquée aussi à certains aspects du Christianisme et de la Kabbale
    juive. Des maçons ayant joué un rôle non négligeable dans le mouvement des idées contemporaines, tels René Alleau
    et Georges Michelson (décédé accidentellement voici quelques années), ont suivi les travaux de Sallantin avec un
    intérêt soutenu. Tout ceci demanderait des développements futurs.
    Un ésotérisme… page 3
    Bref, mon unique propos est de mise en garde. D’avoir jadis erré en des compagnies analogues me
    fait, ce me semble, un devoir de parler, un devoir de dénoncer les fondements radicalement
    anticatholiques et parfois subtilement enveloppés de ces oeuvres. Toutefois, Borella utilise
    davantage un vocabulaire, certaines tournures diffuses, certains rappels qui pourraient donner le
    change et le faire passer pour un auteur orthodoxe, voire scolastique. Il fallait démonter quelque
    peu le stratagème et dévoiler au moins quelques-unes des astuces qui, quand même, avaient abusé
    un Marcel De Corte et un Louis Salleron. C’est pourquoi, j’ai préféré, pour l’examen proprement
    dit de ce livre, céder la place à un analyste compétent.
    1. » L’unité transcendante des religions »
    En tête de cette étude, nous croyons indispensable de commencer par une mise au point
    importante. En abordant quelque domaine inhabituel, on risque toujours des déconvenues causées
    par le sens de mots nouveaux ou par les sens nouveaux de mots connus. Dans ce domaine-ci, il
    faut y ajouter, non plus la nécessité d’un vocabulaire adapté, mais l’utilisation systématique de
    l’équivoque pour faire dériver l’esprit à partir de mots familiers.
    Les fondements radicalement anticatholiques de l’ésotérisme se résument, en définitive, en une
    seule « notion » : l’unité transcendante des religions, expression prétentieuse mais absurde, qui ne se
    comprend guère qu’au point de vue essentiellement antilogique des ésotéristes.
    La logique du bon sens (qu’ils nomment toujours logique aristotélicienne) est en effet l’objet de leur
    souverain mépris, car elle est réputée coupable d’une « réduction » inacceptable au regard de
    l’universel. La lumière, il faut, paraît-il, la chercher dans les doctrines orientales (hindoues) seules
    détentrices de la Métaphysique authentique (avec un grand M). (Cf. principalement René
    Guénon, Introduction générale à l’étude des doctrines hindoues, 1921, pp. 87 et sqq. et La Métaphysique
    orientale, 1925.)
    En fait, la métaphysique-religion des hindous, par un jeu subtil d’équivoques et de sauts parmi les
    analogies, prétend faire la synthèse du oui et du non, de l’être et du néant, du non-être et de la
    Suprême Réalité (l’Atman) (cf. Jacques Maritain, Introduction générale à la philosophie, pp. 12 et
    204). La prédilection pour la philosophie hindoue et le rejet conjoint de la « logique
    aristotélicienne » manifestent donc la gêne extrême des ésotéristes à l’égard de l’objectivité de notre
    connaissance et du principe de contradiction.
    Dans ces conditions, il n’est pas étonnant que l’ésotérisme oppose l’intelligence au sentiment :
    nous baignons en plein volontarisme 5. Voici par exemple un texte de René Guénon exprimant sa
    conception religieuse :
    « Le point de vue métaphysique (avec un petit m – ndlr) est donc, de soi, extra-religieux, il est
    purement intellectuel tandis que le point de vue religieux implique la présence d’un élément
    sentimental qui influe sur la doctrine elle-même. » (op. cit. p. 101)
    L’audace des ésotéristes n’a d’ailleurs guère de bornes : pour désigner leur Métaphysique, ils
    recourent constamment à l’expression philosophia perennis, par laquelle on nomme habituellement
    la philosophie de saint Thomas d’Aquin. Les distraits, qui sont innombrables, se laissent abuser.
    (Et tant pis pour Louis Salleron.)
    Il faut garder en vue ce qui précède lorsqu’on tente de définir cette fameuse unité transcendante des
    religions. Une telle définition a été esquissée par l’écrivain juif kabbaliste Léo Schaya : « L’idée de
    l’unité transcendante des religions, unité qui s’est manifestée, au commencement des temps et en
    5 Dans le volontarisme, en effet, le primat est accordé à la volonté, au détriment de l’intelligence.
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    face d’une humanité encore unie, par une seule Tradition primordiale, a été exposée dans les
    ouvrages de René Guénon et de F. Schuon, et aussi d’Ananda K. Coomaraswamy ; et ils ont
    montré l’identité des Principes essentiels des différentes Révélations orthodoxes, identité qu’on
    peut découvrir dans l’approfondissement métaphysique des dogmes et des symboles – expressions
    qui varient d’une religion à l’autre mais qui, à la lumière de la Vérité supraformelle et universelle,
    perdent leur caractère antinomique et se confondent essentiellement dans l’Un. Cependant, pour
    dépasser l’erreur dualiste, qui peut trouver des prétextes dans les apparences contradictoires des
    diverses Révélations orthodoxes, il ne faut point estomper leurs contours propres par un
    syncrétisme de fantaisie, mais au contraire les respecter strictement de Tradition à Tradition ; c’est
    au fond de l’unicité même de chacune d’elles qu’on trouvera l’Unité commune et supra-formelle
    d’elles toutes : le seul Père et Dieu. » (L’homme et l’Absolu selon la Kabbale. Paris, Dervy, 1977, p. 10.)
    Et un peu plus loin : « Montrer par une métaphysique comparée des religions leur identité
    transcendante, est un moyen de communiquer la connaissance théorique des vérités qui ramènent
    à l’Un sans second ; un autre moyen consiste à exposer les enseignements d’une seule doctrine
    sacrée ». (Idem, p. 11)
    Il saute aux yeux que cet auteur piétine le principe de contradiction : il y a plusieurs Révélations
    orthodoxes (i.e. qui disent la vérité) bien qu’elles soient de caractère antinomique (i.e.
    contradictoires : les contradictoires pourraient donc être vraies en même temps) ; à la « lumière » de
    la Vérité supraformelle, les religions perdent leur caractère antinomique sans perdre leurs contours
    propres ; elles se confondent, mais ce n’est pas là du syncrétisme ; chacune est unique mais elles ont
    une Unité commune ; etc.
    Une pareille aisance autorise n’importe quelle affirmation, y compris que « l’identité des principes
    essentiels des diverses religions » a été montrée. En bref, l’unité transcendante des religions, c’est
    l’identité prétendue de leurs principes essentiels, au-delà de leurs antinomies !
    Notons surtout le recours à une Vérité supraformelle, car tel est le noeud de l’ésotérisme. Toute
    formulation dogmatique est réputée formelle, toute affirmation catégorique est rejetée comme
    particulière. Que reste-t-il alors ? Une « Vérité supraformelle », i.e. beaucoup de divagations, loin
    de tout bon sens et loin de la doctrine catholique.
    Au fond, l’ésotérisme jette de la poudre aux yeux. La pédanterie du langage et les termes
    apparemment techniques ne sont qu’astuces trompeuses : l’unité transcendante des religions
    consiste en une « Vérité » dont on ne peut rien dire de précis sans se condamner à retomber
    aussitôt dans le « formel » et le particulier. Le flou, l’ambigu, l’équivoque et une symbolique
    épuisante masquent mal l’orientation inévitable des doctrines ésotéristes vers le vide. Jean Borella
    écrit sans rire : « Ignorance pure et absolue, radicalement immanente à la pure Connaissance ». (La
    charité profanée, p. 375.)
    Le terme Tradition qui revient sans cesse sous la plume des auteurs ésotéristes n’a donc pas du tout
    le sens de la Tradition chrétienne. La Tradition primordiale dont ils parlent, ce sont ces fameux
    « principes essentiels communs aux différentes Révélations orthodoxes » (Léo Schaya, texte cité).
    Par où l’on voit que le mot Révélation n’a pas non plus le sens catholique (la Révélation
    chrétienne n’admet pas de pluriel). Voici : à l’humanité originelle est consentie une « Tradition
    primordiale » (on ne nous dit jamais d’où elle est transmise, d’ailleurs), intégrale et parfaite : les
    ésotéristes la nomment Révélation primitive, mais ils désignent par là tout autre chose qu’un
    enseignement reçu de Notre Seigneur. Un auteur guénonien, Luc Benoist, conservateur honoraire
    aux Musées de France, explique : « La tradition est la transmission d’un ensemble de moyens
    consacrés qui facilitent la prise de conscience de principes immanents d’ordre universel (…)
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    L’idée la plus proche… serait celle d’une filiation spirituelle de maître à disciple, d’une influence
    formatrice analogue à la vocation ou à l’inspiration… » (L’ésotérisme, p.u.f., Paris, 1963 ; pp. 15-16.)
    Ce qui est transmis, ce n’est donc pas une doctrine, mais des moyens qui facilitent une prise de
    conscience de l’Universel immanent, autrement dit, du panthéisme.
    Les âges se succédant (suivant la très complexe théorie des cycles cosmiques qu’il n’est pas
    possible d’aborder ici) en un vaste mouvement cosmique de décadence, la « Tradition
    primordiale » se diversifie en des traditions particulières. Dans cette perspective, les formes
    religieuses multiples (y compris et surtout la religion catholique) ne sont que des dégénérescences
    destinées « aux foules des fidèles » (Luc Benoist, op. cit.) (d’où l’appellation d’exotérismes). En même
    temps, une sorte d’occultation s’opère quant au sens profond, unique et universel, qui survit dans
    les enseignements ésotériques des diverses traditions particulières.
    On se demande comment Louis Salleron et Marcel De Corte ont pu confondre ces très vieilles
    élucubrations avec la doctrine catholique.
    2. Un prêtre singulier : l’Abbé Stéphane
    Fait significatif – observons-le d’emblée – l’Introduction à l’ésotérisme chrétien de l’abbé Henri
    Stéphane est publiée chez un éditeur dont l’abondant catalogue ne comporte aucun livre
    catholique en regard d’une vaste production relative à l’ésotérisme, à l’orientalisme et à la Francmaçonnerie
    (avec une brochette d’auteurs maçons patentés). Abbé Henri Stéphane ! il s’agit, en
    fait, de l’abbé André Gercourt. Ce prêtre, de formation scientifique, enseigna à l’École Sainte-
    Geneviève, à Versailles. Borella et Chénique le décrivaient volontiers « comme aigri et d’allure
    célinienne »…
    C’est en 1977 que Jean Borella écrivit la préface au livre de l’abbé Stéphane. Ce prêtre, déclarait-il,
    représentait, pour quelques amis, « une sorte de maître à penser » (p. 7). Approchons-nous de ce
    maître.
    « Il était centré sur le mystère trinitaire » (p. 7), imprégné de saint Jean de la Croix et d’Élisabeth
    de la Trinité… Fort bien ! Or voici que le « maître » découvre René Guénon par la lecture du
    Symbolisme de la Croix ! Borella écrit :
    « La rigueur et l’ampleur des perspectives guénoniennes l’engagèrent à une étude attentive de
    toute l’oeuvre ». (…) À cette lecture, il joignit celle de F. Schuon dont l’autorité ne lui parut pas
    moins grande, et qui, sur la mystique chrétienne et universelle, projetait des lumières uniques.
    (pp. 7-8)
    Puis, c’est une lamentation sur la crise ouverte par Vatican II, crise qu’il avait, apprend-on, prévue
    depuis longtemps. Voilà bien le piège. Toutes les positions analogues, viciées par la croyance en
    un prétendu ésotérisme chrétien, sont amenées à rejeter le modernisme avec une force qui, à
    première vue, ne le cède en rien à celle des catholiques les plus fidèles à l’enseignement de l’Église.
    Mais ce rejet, d’un tout autre sens, ne procède pas des mêmes motifs et ne recouvre pas les mêmes
    notions. D’où tant de fatales méprises en ce domaine.
    Enfin, l’abbé Stéphane s’est intéressé aussi, entre autres, à la Maçonnerie et à ses rapports avec le
    christianisme, particulièrement dans l’oeuvre de Jean Palou 6 et celle de Jean Tourniac 7 (p. 8). Et,
    6 Jean Palou : 1917-1967. Fut professeur à l’Université de Caen. Homme « d’une érudition immense », écrivain,
    historien de la franc-maçonnerie. Initié à la Grande loge de France (R.E.A.A.) en 1960, Loge Thebah à l’O





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