• L'Alchimie

     

    L'alchimie est probablement, avec la magie rituelle, la plus ancienne science de l'humanité. Le renouveau qu'elle connaît aujourd'hui est un paradoxe avec le matérialisme mélangé d'incrédulité qui caractérise notre pensée actuelle. Quelle victoire éclatante pour cette discipline dite "empirique"!... Empirique? Pour le seul pays de France, les bibliothèques régionales et nationales regorgent de plusieurs milliers d'ouvrages, manuscrits ou imprimés, dont certains n'ont jamais été traduits en français contemporain ou étudiés. Empirique? Cette véritable science qui donna naissance aux alcaloïdes, sels, acides, bain-Marie, eaux-de-vie et tant d'autres éléments chimiques encore en cours dans notre chimie moderne.

    L' ’Art Royal

    L'étude de cette science hermétique, appelée "Art Royal", fait des adeptes de plus en plus nombreux au sein d'une élite cultivée et de haut niveau technologique qui pourrait être tout sauf des farceurs. Nous sommes loin des images populaires de souffleurs à longues robes sombres et chapeaux pointus. Notre époque est celle des ouvertures et des secrets enfin révélés et cette situation recule considérablement l'exploration des domaines humains encore obscurs.
    L'étude de la science hermétique était autrefois réservée à une caste et une élite loin de l'état de crédulité montré habituellement tel que: rois, papes, personnages politiques ou scientifiques... en un mot: ceux qui s'évertuaient à traquer les alchimistes, et surtout à entretenir la conspiration du silence imposée par la propriété de pouvoirs qu'ils savaient illimités dans la matière et la maîtrise de la durée.
    L'étude de l'Art Royal est maintenant un peu plus accessible, en raison d'une grande divulgation littéraire, aux "curieux de nature" prêts à fournir l'effort nécessaire et surtout la remise en question de leurs modes de pensée et connaissances chimiques ou spirituelles afin de s'affranchir de leurs limites.

    L’'Arcane majeure

    Si l'arcane majeure passe effectivement par la production matérielle de l'argent-lune ou de l'or-soleil, il est évident que si le but se résumait à cette seule opération, ce serait un résultat bien mince... au sens Philosophique du mot! L'alchimie est en réalité l'accès à la connaissance ultime de l'univers, aussi incroyable et inacceptable que cela puisse paraître. A ce sujet, la sélection des chercheurs "Amoureux de la Vraie Science" se réalise d'elle-même. Celui qui est attiré par la seule production de "teintures minérales" s'égarera dans le labyrinthe ténébreux des textes, dont il ne mesurera jamais ni la portée, ni le sens profond et dont il ne sortira qu'à grand peine ou totalement écoeuré.
    Le "Philosophe de Nature" ne désirant que la seule science obtiendra, en gage de sa persévérance, la transmutation matérielle. Ce chercheur d'absolu aura à coeur de "pressentir", au delà de la transmutation de la matière, une véritable transsubstantiation physique, débouchant sur l'accès à des secrets de la nature, généralement inaccessibles à notre vision du sens commun.

    Le secret de la matière

    Percer le secret de la matière n'est pas chose facile, et si ténu est le fil d'Ariane dans les méandres du grand dédale alchimique, que rares sont les élus parvenant à le découvrir, pour protéger leurs travaux et leur vie, les "philosophes de nature" utilisèrent une langue cryptée extrêmement obscure. Il semble aussi que, pour embrouiller un peu plus l'écheveau, le système de chiffrage varie aussi d'un chercheur à l'autre... Aussi, la première épreuve à subir est-elle de surmonter les difficultés pour accéder aux clés de lecture. Cette science est établie sur une base cabalistique évidente et il va de soi que la transmission des bases de données ne peut "s'entendre que de bouche à oreille... sous peine de perdre sa "substantielle moelle". Le fabuleux secret est si précieux qu'il doit être à tout prix dissimulé des yeux néophytes et, s'il est parfois nécessaire pour les initiés de s'en entretenir, ce ne sera qu'au travers d'énigmatiques images, allégories, discours métaphysiques et propos équivoques destinés à brouiller les pistes. Prenons, par exemple, les trois éléments d'alchimie les plus usités: le "soufre" désignera l'élément masculin, fixe et actif. Le "mercure" sera l'aspect féminin, volatil et passif. Enfin le troisième: le "sel" ou "arsenic", qui sera le liant ou lien relationnel ou encore le fruit des deux précédents. Notons aussi que "sel" vient, en alchimie, du mot "sceller": fermer, mais aussi signer...

    Chaîne et livre muet

    Il semblerait que chaque ouvrage, comme lié à une invisible chaîne, ne puisse qu'éclairer un autre ouvrage qui lui-même contient ce que les autres ne possèdent pas. A ce sujet, le ‘Mutus Liber’ est inflexible: « Lis, lis, lis, relis, travaille et tu trouveras ». Ultime et utile conseil contenu seulement à la dernière feuille de ce "livre muet"! Pour rester au début de cet ouvrage rare, il sera utile d'en lire les chiffres, nombres et lettres en les retournant. Ainsi 21-11-82. NEG donnera pour information GEN. 28-11-12. Ce groupe nous informe que l'auteur place symboliquement ses travaux sous un rapport biblique et particulièrement en ce qui concernera la GENèse... les chiffres nous informent sur les livres, chapitres et versets en question... idem pour les deux autres informations NEG. (autre chapitre de la genèse) et TUED qui signifie DEUTéronome... Comme on peut le voir, le premier obstacle à surmonter est de se familiariser subtilement avec les termes alchimiques, tout en restant d'une vigilance de chaque instant. En effet, il est facile de débuter par les ouvrages les plus clairs et les plus accessibles, mais il faut une prudence proportionnée à la facilité, car il est à craindre, dans ce domaine, que ces textes cachent, en vérité, les tromperies et les pièges les plus insidieux. Nous en avons un exemple flagrant en ce qui concerne "Entrée Ouverte au Palais Fermé du Roi" d'Eyrénée Philalète, qui reste une des oeuvres les plus ambiguës en ce domaine.
    Cette pénombre secrète, ce mystère entretenu, donnent le prétexte à présenter le Grand Oeuvre comme une chimère ou un mirage utopique. C'est cet aspect du problème qu'utilisent de nombreux "savants" pour démontrer l'extravagance de l'alchimie. La conclusion de cette joute livresque est résumée par un antique sage grec qui affirmait: « J'ignore tant de choses que je puis dire: je sais seulement que je ne sais rien! Ce qu'on nomme la science a souvent des préjugés infiniment plus difficiles à vaincre que l'ignorance elle-même. »

    Jeux des mots

    Quasiment tous les écrits alchimiques disponibles aujourd'hui passent sous silence la première phase de l'œoeuvre, ou alors l'éclairent de descriptions débridées et fantaisistes. C'est le cas pour la matière première, affublée des termes: dragon, pierre des philosophes, mercure, dissolvant... en tous les cas, rien de concret ou d'opérationnel!
    Ce handicap est majeur, car même si l'on comprend le processus, il est impossible à mettre en "oeuvre" sans la matière de base. La mise en oeuvre pour rendre "opérative" cette matière primordiale passe par des épreuves symbolisant les 7 travaux d'Hercule et s'achevant par la conquête de la toison d'or des "Philosophes de science". Il faut effectivement la patience, la persévérance, la motivation d'un "hercule" pour accomplir les travaux à travers les premiers processus, qui ne peuvent se réaliser sans la connaissance entière des éléments de base, tels que les quatre bases primaires: Eau > Aqua, Terre > Terra, Air > Aer et Feu > Ignis... Ils s'opposent deux par deux pour former la ‘Croix d'Éléments’ appelée ‘Contraria’!
    Temps et patience! Le procédé, outre le travail au "fourneau", ne se "réalise" (au sens noble du mot) vraiment qu'en accord rigoureusement parfait avec le "sel" de l'esprit, dont nous reparlerons plus tard. Il n'est pas simple, de prime abord, de comprendre le procédé de captage, en quantité nécessaire de ‘l'Esprit Substantiel’, sans lequel rien ne saurait être entrepris... qui ne soit l'Art Royal! Cet "esprit" n'est autre que le feu enté sur le minéral cubique de la maîtrise suprême régissant l'univers. Cet "esprit" issu du soleil réduit et inhibe la matière. Tout ceci n'est que le travail "initial". Initial est ici à prendre au sens étymologico-symbolique, à savoir: Initial, qui commence aussi après avoir vécu l'initiation, l'ouverture, la re-naissance, la clarté. L'art d'alchimie n'est jalonné que d'ombres et de clartés.

    Solve et Coagula

    Ensuite? Cyliani nous dit: « maintenant que tu as passé les travaux d'Hercule et que tu possèdes les matières, ce n'est plus qu'un travail de femme ou d'enfant attentif et soigneux ». Ce ne sont plus que cuisson et veille d'entretien. Dès cet instant, toute l'oeuvre philosophique ne se résume plus qu'à Solution et coagulation! Si l'on a bien su lire, car on ne peut en dire plus, il est aisé de concevoir que la pierre générée imite à la perfection l'univers de sphères. La genèse nous conforte sur ces événements générant la séparation du chaos des éléments, l'épais du subtil, pour qu'enfin reculent les ténèbres devant la lumière... Pour dépasser le premier obstacle, il est indispensable de s'abstenir de toutes conceptions habituelles et ordinaires. Pour appréhender les multiples opérations, il est nécessaire de suivre rigoureusement l'évolution établie par la nature elle-même. : « Que la nature soit ton guide, que ton art la suive pas à pas; car tu t'égares loin d'elle » - Michel Maïr (Emblème XLII)
    Mais que de temps perdu dans l'acquisition, hypothétique, de l'ensemble indispensable des connaissances nécessaires à la réalisation du grand magistère. Que de temps perdu à parcourir le dédale des ouvrages avares de vérités opératives... mais larges de détails allégoriques creux et redoutablement vide d'instruction. Que de temps perdu et de déceptions devant ces volumes qui pourtant offraient toutes garanties de vérité.

    Le tangible et les trois règnes

    Le moment est arrivé de révéler les opérations jusque là soigneusement occultées. Malgré ce qui peut se dire, il est encore possible d'accéder au magistère de la transmutation.
    Nous sommes en mesure de produire les répertoires complets, clairs et précis, sur les unités de poids et de mesures, temps et quantités. Nous pouvons aussi donner de nombreuses descriptions de travaux compréhensibles par l'adepte attentif. A titre indicatif, nous pouvons fournir un détail qui bouleverse tous les travaux, sens de recherches, et préceptes admis et établis à ce jour dans ce domaine.
    Faisant momentanément abstraction de la phase spirituelle, il est possible de réduire à ce simple tableau les règnes terrestres et les sciences qui leur correspondent: Règnes: Minéral - Végétal - Animal.

    Il est entendu que le règne humain est compris dans le règne dit "animal", dont il se veut le plus beau fleuron, car nous sommes dotés de l'élément le plus fabuleux: l'esprit! Cet esprit qui nous fait "pensants" et donc doués d'intelligence.
    A ces règnes correspondent leurs travaux essentiels:
    -Minéral > Alchimie > Transmutation de l'impure et lourde matière et un matériau noble et pur.
    -Végétal > Spagyrie > Transmutation du principe passif en principe actif.
    -Animal >

    Si l'on regarde à présent les écrits concernant ces travaux hermétiques, nous constatons qu'il en existe près d'un millier en ce qui concerne l'alchimie, pas plus d'une douzaine pour la spagyrie et... aucun pour cette science sans nom!

    Science ‘innommée’

    Du tableau précédent nous pouvons déjà dégager quelques conclusions provisoires:
    Il apparaît que l'homme, très vite, s'est attaché à étudier et pratiquer l'alchimie , ainsi qu'à produire des écrits en grandes quantité sur ce domaine, pourtant, semble-t-il, bien hasardeux . Ces écrits, en outre, sont assez obscurs ; nous l'avons vu précédemment.
    Puis, il y a cette seconde science découlant de la précédente: la spagyrie. En ce qui concerne cette dernière, les écrits que l'on peut se procurer sur ce sujet sont assez accessibles et permettent des travaux extrêmement intéressants et productifs. Curieusement il y a très peu d'ouvrages...
    Quant à la troisième science... elle n'a pas de nom, ni d'ouvrages! Peut-on dire qu'il s'agisse de cette fameuse science ‘innommée’ dont parlent à mots très couverts quelques rares initiés? Pourtant, si une telle science existe, et si l'on imagine la courbe suivante: moins il y a d'écrits, plus ce travail est réalisable et accessible, nous devrions en trouver au moins une forme de mémoire. De constat nous pouvons dégager deux solutions:
    1) Aucun travaux, aucune recherche sur cette voie! Dans ce cas, il est évident qu'il n'y aurait eu aucun écrit. Mais lorsque l'on connaît l'état d'esprit des chercheurs en alchimie, il est impossible d'imaginer qu'aucun d'entre eux ne se soit aventuré dans cette direction ou en ait tenté la moindre approche... C'est impossible!
    2) Il y eut des travaux. Celui (ou ceux) qui explora ce sentier très étroit aboutit à une telle révélation, que jamais il n'osa révéler ou engager plus loin la recherche sur cette voie Sur-Royale (au sens alchimique bien entendu). A moins que l'initié, s'il n'y en eut jamais un seul, n'ait craint le bûcher au Moyen-Age, ou tout autre mode de destruction à notre époque... ou la damnation et l'errance dans les confins du châtiment universel et de son cloaque.

    Un petit document manuscrit

    Maintenant, grâce à la découverte d'un petit document manuscrit au fond d'une bibliothèque municipale, nous avons la certitude que ce "trajet" fut réalisé dans des conditions optimum... et conduit à bonne fin. La vie, ou plutôt la durée de vie de certains personnages, ayant pratiqué à haut niveau des travaux "chimiques", nous autorise à croire qu'ils réussirent l'étape ultime du Grand Oeuvre: la panacée universelle. Cette dernière garantissait à celui qui l'ingurgitait une durée de vie considérablement augmentée, sauf accident violent, ou blessure irrémédiable telle que décapitation. En un mot, la fontaine de jouvence. Car enfin, qu'est-ce que le vieillissement, sinon la destruction lente des cellules humaines? Le fait de bloquer ce processus équivaut à arrêter le vieillissement. Puis, en intensifiant la procédure, il y a restructuration des cellules et... vie extrêmement prolongée! La troisième voie d'alchimie innommable est ni plus ni moins que la réalisation de la panacée universelle tirée... D'UNE TEINTURE MERE HUMAINE, soit la résolution de tous les maux du corps et de l'esprit! La méthode?... Elle serait redoutable de simplicité. Il suffirait de prendre de la materia prima d'origine humaine et de la traiter simplement par la voie, et alchimique et spagyrique. Ce qui est tout à fait réalisable. Réalisable, oui mais!!! Car il y a heureusement un « mais »! et il se résume à une question extrêmement simple: quel est le nom de cette "materia prima humaine"???

    Notre pire ennemi

    Il est maintenant possible d'accéder, sans trop de risques, à cette science sans nom. Seul celui qui a médité peut s'y aventurer, en considérant auparavant qu'à tout moment notre pire ennemi nous guette dans cette démarche merveilleuse: nous-même! Un seul faux pas sur cette voie et la précipitation dans le sacrilège est immédiate et irréversible. Que le néophyte y songe à plusieurs fois avant d'en réclamer le processus opératoire correspondant.
    Car comment imaginer l'aboutissement de cette recherche fulgurante lorsqu'on imagine déjà les conséquences de l'alchimie sur l'esprit et de la spagyrie sur la matière ? Il faut en conclure, et peut-être à ce stade, déjà, sommes-nous allés trop loin, par le fait que cette quête est innommable en se répercutant sur les cinq sens formant la quintessence!
    Les sens donnent la sensitivité. Cette dernière, ne l'oublions pas, est une partie seulement de la préhension, du sentiment, et de la compréhension. Cette voie est la seule véritable ouverture sur le mystère de l'esprit et de la matière, les deux étant liés à la génération de nos cellules et à l'amplification des pouvoirs de défense de notre corps. En dire plus, ici, serait franchir inconsidérément les frontières autorisées...

    André Douzet

    LA TABLE D'EMERAUDE D'HERMES TRISMEGISTE

    « Il est vrai, sans mensonge, certain et très véritable. Ce qui est en bas est comme ce qui est en haut, et ce qui est en haut est comme ce qui est en bas, afin que la merveille de l'unité se réalise.
    Ainsi toutes choses ont été et sont venues de l'un, ainsi toutes ces choses sont nées de cette chose unique, par adaptation.
    Le soleil en est le père, la lune en est la mère, le vent l'a porté dans son ventre, la terre est sa nourrice; le Thélème de tout le monde est ici.
    Sa puissance est sans limite sur le monde.
    Tu sépares la terre du feu, le subtil de l'épais, doucement, avec grande industrie.
    Il monte de la terre vers le ciel, et redescend aussitôt sur la terre, et il recueille la force des choses supérieures et inférieures. Tu auras ainsi toute la gloire du monde, et c'est pourquoi toute obscurité s'éloignera de toi.
    C'est alors force de toute force, car elle vaincra toute chose subtile et pénétrera toute chose solide.
    Ainsi le monde a été créé.
    Voici la source d'admirables adaptations indiquées ici.
    C'est pourquoi j'ai été appelé Hermès trismégiste, ayant les trois parties de la philosophie universelle. Ce que j'ai dit de l'opération du soleil est complet. »





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