• Ma Ananda Mayi

     

    Ma Anadamayi Etre en totalité

    Comment aborder un Etre tel que Ma Anandamayi ? Dans un premier temps et c'est bien naturel, nous pensons:
    "Ah! L'Inde, ses sagesses. Là-bas, ailleurs. Comment atteindre.etc."
    Un jour, nous comprenons que cet Etre-là est plus proche que nous-même à nous-même.
    Pour aborder ce très proche, le geste à faire est de l'ordre du "moindre geste".
    Je veux dire par là qu'aucune gesticulation n'est conseillée, aucun effet appuyé. Nous ne pouvons plus depuis Août 1982 rencontrer Ma Anandamayi dans "ce corps"(elle se nommait souvent ainsi), mais des milliers de personnes qui ont été infailliblement bouleversées par elle, l'ont gardée discrètement, simplement en leur cœur. Pas de monuments à sa mémoire, pas de successeur, de "grand(e) disciple qui continue son œuvre ".
    Elle disait: ".quant à une transmission de maître à élève, rien de tel ici. Il n'y a pas de corps pour cela, ni physique , ni autre que physique. Il est dit: IL N'Y A QUE UN SANS SECOND. Dans le Soi, il ne peut y avoir de second. La notion du "deux" n'apparaît que dans les opérations mentales. En réalité sans pieds il marche, sans yeux il voit." L'héritage est plus intime, plus discret. Aucune structure ne peut en rendre compte. Chacun est laissé à SOI-même !
    Pourtant, de Mai 1995 à Mai 1996, va se fêter le centenaire de sa naissance dans toute l'Inde et ici aussi. Un vent s'est levé soudain. De son "vivant" Ma dans tous ses déplacements était imprévisible, ses arrivées étaient inattendues. Il semble bien que "l'inattendu(e)" ait choisi de se montrer. A nous d'être vifs et présents. Des livres paraissent en France, des émissions sur France-Culture ou des rencontres. En Inde, des foules bigarrées, de toutes appartenances religieuses, des hommes d'Etat, de grands érudits lui rendaient hommage (Mahatma Gandhi, Pandit Nehru, Mme Indira Gandhi.). L'anniversaire se fêtera "là-bas" sous l'égide du gouvernement. Toutes les sensibilités spirituelles s'y associent (elles sont toutes représentées en Inde !).
    Ma Anandamayi s'est intégralement offerte à toutes ces approches, l'approche "sans Dieu" ayant à ses yeux aussi sa place.
    C'est sa troublante singularité. Elle ne préconise pas une voie pour atteindre un but. Elle encourage chacun sur sa voie.
    Ultimement, elle dira: "Une direction donnée permet d'atteindre un but donné. Tout le reste est par ailleurs hors d'atteinte.
    Mais quand la direction s'évanouit entre ce qui s'atteint et ce qui est hors d'atteinte, CELA se révèle." en totalité.

    Qui est ANANDAMAYI?



    Qui est "envahie de joie"?

      
    Lui dans toutes les formes, éternellement intronisé au coeurde tout être.
    En vérité, il demeure partout.
    Ayant vu Cela, atteint Cela, tout est vu, tout est atteint. Ce qui signifie: être sans peur, sûr, libre de tout conflit, immuable, impérissable.
    Je n'ai pas la place de me retourner.
    On ne peut aller nulle par où Il ne soit.
    Je ne fais ou ne dis rien avec un motif ou par effort de volonté. Ce sont vos pensées ou désirs qui font dire ou faire des choses à ce corps pour votre bénéfice.

    Je vois souvent ce qui va arriver dans le futur, mais souvent aussi les mots ne viennent pas.
    Je n'ai aucun besoin de dire ou faire quoi que ce soit. Il n'y a jamais eu aucun besoin.
    Il n'y en a pas maintenant. Il n'y en aura pas non plus dans le futur. Ce que vous voyiez manifesté en moi dans le passé, ce que vous voyez maintenant, ce que vous verrez dans le futur, est pour le bien de tous.

    Si vous cherchez ce qu'il y a de particulier en ma personne, je dois vous dire que le monde entier est ma personne.

    Qui est "ce corps"?


    Ce corps est une marionnette, il joue ce que vous lui faites jouer.
    Ce corps répond aussi au cri fervent de ceux qui ne l'ont jamais rencontré.
    Qui suis-je ? On peut dire qui l'on est si l'on a une perception de soi-même.
    Je n'ai pas cette perception.
    Alors je suis ce que vous voulez que je sois.

    Quelques incitations !


    Faites alterner jouissance et renoncement. Progressivement, en acceptent et en éloignant les plaisirs, le désir perdra son emprise.
    Tous, vous n'êtes que des enfants; harcelez votre Mère. Poursuivez-là: "Tant que tu ne m'auras pas accordé la béatitude, je ne te lâcherai pas!" Vous n'êtes que des enfants. Que pouvez-vous comprendre du service?

    Demandez la Béatitude


    Il est nécessaire de s'atteler à sa quête avec la ferme intention de n'y pas renoncer, fût-ce au prix de sa vie.
    Les sons ne se propagent pas bien dans une pièce encombrée. Dans un espace nu ils se déploient. De même si l'esprit est nu, notre vraie nature se déploie spontanément. L'écho vous fait entendre votre propre voix. Votre vrai nature se révèle dans un coeur pur.

    Etre en chemin

    J'appelle les écritures des horaires de chemin de fer. Vous voulez aller par le train d'un point à un autre. Toutes les stations jusqu'à votre destination sont indiquées. Mais seulement les noms.
    Comment vous faire une idée des lieux eux-mêmes? En plus tout n'est pas indiqué, seulement les agglomérations les plus importantes.
    Les Ecritures ne disent pas non plus tout d'une quête spirituelle. Elles indiquent les grandes étapes. Vous n'y trouverez pas quantité d'expériences qui peuvent survenir, ni les infinies nuances d'une progression.
    P eut-on répertorier les passages de couleurs d'un lever du jour?
    Les Ecritures peuvent-elles avoir le dernier mot en matière de quête spirituelle.
    Elles montrent les grandes lignes (et pas toutes).
    C'est pourquoi nous dirons: ce qui se trouve dans les Ecritures est aussi vrai que ce qui ne s'y trouve pas.

    Pratiques spirituelles


    Dire: "au moyen du silence, Il se révèle" n'a pas de sens. La Connaissance Suprême ne vient pas au moyen de quoi que ce soit.
    La Connaissance Suprême se révèle d'elle-même. Mais, pour dissoudre ce qui voile, certaines pratiques spirituelles, certaines disciplines sont opportunes.
    Le silence réel s'impose quand la pensée n'a plus nulle part où aller. Mais en réalité, qu'il y ait pensée ou pas, que l'on parle ou pas, ne fait aucune différence!
    Le laisser-moi me donner sans attendre aucun résultat est encore un désir de résultat! Néanmoins, cette aspiration à l'action non-égoïste l'aidera peut-être à advenir.

    Un bon climat


    Rien ne doit être forcé. Il suffit de favoriser un bon climat et vos proches se développent spontanément.
    Le fruit le plus succulent est celui qu'on laisse mûrir tranquillement sur sa branche.
    L'esprit est agité. bien sûr, il se démène de tous les côtés et ne s'apaise que s'il hérite enfin de son bien propre, son droit de naissance: la pure attitude.

    Ouïe


    Est ENTENDU, vraiment entendu, ce qui une fois entendu enlève tout désir d'en entendre plus.
    Est VU, vraiment vu, ce qui une fois vu enlève tout désir d'en voir plus.

    Méditation: faire ou être


    Dans la méditation faire et être sont si différents!
    On tente de méditer, on fait de la méditation,
    mais le jour où la méditation émane de soi,
    où elle est, quel autre monde!

    Nom de Dieu

    Appelez simplement Dieu par le nom que vous préférez. Au moment opportun, il vous dira Son Vrai Nom.
    C'est la même chose quand vous apercevez quelqu'un que vous avez connu comme ami d'enfance. Vous l'appelez par son surnom d'alors, ou vous dites seulement:
    "Hé! Ho!". Il ne tardera pas à vous dire son nom.
    Quel que soit le nom que vous utilisez pour appeler Dieu, il répondra.

    Il n'y a rien à quoi renoncer
    Trouvons plutôt l'élan pour traverser la vie. Après tous ses élans restreints, l'être humain doit trouver le Grand Elan.
    Les visions, les vibrations se manifestent tant que nous en sommes au monde du je veux. Du moment où nous rejoignons notre nature réelle, ces distinctions disparaissent.

    Décidez de ne jamais mentir
    Si la situation est telle que vous ne puissiez dire la vérité, restez silencieux. Ne reniez pas votre serment. Dieu est vérité et la recherche de Dieu est affaire de sincérité.
    Continuez à marcher vers Cela. Ne vous arrêtez pas en chemin, même pour voir où vous en êtes. Si vous le faisiez, vous perdriez un peu du bénéfice de votre progression. Ne vous arrêtez jamais. Allez!

    Ne plus croire en rien est une phase naturelle de toute quête spirituelle
    En un sens, les Déïtés, les Ecritures induisent en erreur. Toute tentative de confiner dans les mots et les concepts ce qui est inexprimable falsifie.
    Mais déclarer ou écrire que les Ecritures sont fausses est une autre forme d'Ecriture.

    Présence
    Le mystère de l'univers se révèle à qui
    sait atteindre le non-quoi-que-ce-soit.
    Un bébé ne sait pas dire maman et pourtant quand il pleure, la mère sait qu'il l'appelle.
    (Ça ne marche pas avec les grands!)
    De la même façon, tant que nous sommes ignorants nous pouvons appeler Dieu par n'importe quel moyen. Il comprend.
    Quand le guru dit: je suis toujours avec vous, cela peut s'entendre de bien des façons.
    Allons d'abord au plus vaste: Le guru est inséparable de chaque particule de l'univers. En cela il n'est pas distinct de vous. L'univers n'est qu'une seule et même substance.
    Le guru et le disciple en font partie, inséparables.
    En cela, le guru est avec vous.


    Extraits de Vie en jeu par J-C.Marol ,
    choisis et préparés par l'auteur.
    L'Originel J-l. Accarias Editeur

    L'incarnation terrestre la plus proche de la Quintessence par Arnaud Desjardins

    Venue au monde en 1896, Nirmala Sundari Devi, par la suite appelée Ma Ananda Mayi, n'est pas tenue pour un gourou ordinaire. Nombre d'hindous, - et d'occidentaux saisis par son rayonnement - voient en elle un être affranchi dès sa naissance du voile de l'illusion. En proie dès l'enfance aux extases et aux ravissements, elle aura tôt fait d'attirer à elle les foules, dans une atmosphère de ferveur et parfois de miracle, donnant sans jamais réfléchir d'éblouissantes réponses aux questions des plus érudits. Se désignant elle-même comme "ce corps-ci" ou "cette petite fille", elle laissera se produire signes et prodiges et demeurera immuable face aux puissants ou aux humbles. Aux pressantes interrogations sur la nature réelle, elle répondra un jour: "Comment des questions aussi enfantines surgissent-elles dans votre coeur!.Je suis ce que j'étais et ce que je serai. Mais le fait suprême, c'est que ce corps n'a pas pris forme pour recueillir les fruits d'un karma passé."
    Nombre de témoins éminents se verront poussés, pour tenter de la décrire, à user de qualificatifs inhabituels. Le grand photographe britannique et spécialiste de l'Inde, Richard Lannoy, observera à son propos que "décrire un être d'une subtilité dont la rareté défie l'imagination est vraiment la méthode la moins appropriée au monde"."Il y a chez Ma quelque chose d'étrange, une qualité mystérieuse, ineffable, qui est si près de franchir les limites de ce que l'on peut définir comme humain qu'appliqué à elle, l'adjectif "humain" est tout à fait impropre. Elle était certainement ce que nous pouvons imaginer de plus proche d'une incarnation terrestre de la Quintessence: l'illumination, la clarté. Elle était si parfaitement exempte de nos fardeaux ordinaires qu'en l'écoutant, l'on pouvait entendre l'essence même de l'être intérieur."
    Après l'avoir vue à la télévision dans le film tourné par Arnaud Desjardins, François Mauriac écrira dans son Bloc-Notes:".cette sainte fameuse de Bénarès dont le visage a un tel pouvoir que nous-mêmes, Occidentaux et chrétiens, demeurerons tous ce soir sous l'influence de ce regard, longtemps après qu'il aura disparu de l'écran."

    Arnaud Desjardins ou l'aventure de la sagesse par Gilles Farcet, Table Ronde

    A l'instant même par Vijayananda


    Un soir à Varanasi, Mâ marchait sur la terrasse donnant sur le Gange. Je m'appuyais contre le petit temple de Siva, près de la terrasse.
    Ce jour-là j'étais très abattu pensant que je ne progressais pas assez. Je regardais tristement Mâ et lui dit mentalement: "Mâ, Vijayananda n'a pas encore remporté la victoire (vijaya).
    Tandis que je pensais ses mots, j'avais cueilli tout à fait automatiquement l'une des fleurs de l'aak qui pousse dans la cour de l'Ashram.
    Ce n'était qu'un bouton qui était complètement fermé. Je le pris dans ma main gauche et touchai légèrement sa partie supérieure d'un doigt de la main droite. Aussitôt, le bouton s'ouvrit lentement et développa ses pétales jusqu'à un plein épanouissement. Je n'avais exercé aucune pression mais l'avais seulement touché avec légèreté. Ce n'était pas dû non plus à quelque force pranique puisque je n'ai jamais pu le refaire.
    Il n'y avait pas de doute, c'était la réponse de Mâ à ma plainte et, de façon originale, elle s'est gravée dans mon esprit à l'instant même. C'était assez clairement ce que répliquait d'habitude Mâ à une plainte ou à une demande de cette sorte. Ça (la réalisation de soi) peut arriver même maintenant, à cet instant même! Vijayananda

    Le non-souci, méditation suprême
    Jacques Vigne nous envoie ce témoignage de Hardwar en Inde où il vit depuis dix ans auprès de Vijayananda, disciple français de Ma qui a passé plus de trente ans auprès d'elle.
    Qu'ai-je appris ici, où je suis venu pour la première fois il y a juste dix ans, au moment où je terminais mes études de psychiatrie? Déjà, que la recherche de l'Essentiel et l'abandon de ce qui ne l'est pas sont deux processus inséparables, comme les deux faces d'une même pièce. Du point de vue psycho-spirituel, le fait de suivre un enseignement centré sur une femme considérée par beaucoup comme une manifestation de la Mère divine facilite grandement un transfert positif et la transmutation de l'énergie vitale, cette montée régulière de la Kundalini si importante pour pouvoir rentrer dans une véritable pratique. En ce sens, Ma peut inspirer chez les Occidentaux une résurrection de l'anima.
    Elle parlait peu mais demandait à ses disciples engagés de pratiquer beaucoup. Cela pu déconcerter certains Occidentaux à la tournure d'esprit intellectuelle, mais le fait est là: on trouve le soi par sa propre expérience plutôt que par des discussions ou par la recherche d'innovations théoriques.
    Ma était quasi-illettrée; j'ai moi-même étudié plus de quinze ans à l'université, et pourtant, je me suis aperçu que je ne connaissais pas son "alphabet", et je suis content maintenant de l'apprendre progressivement.
    Je trouve en suivant son enseignement la joie intérieure, un sentiment qu'il faudrait introduire d'urgence dans la psychologie occidentale si tant est que l'on veuille l'animer d'un souffle spirituel. Je me laisse inspirer dans ma pratique par un avis de Ma que j'aime bien: "le non-souci, méditation suprême".

     la rencontre de Ma par Arnaud Desjardins


    "Au bout d'une ruelle, voici une immense foule, massée près d'une entrée croulant sous les banderoles, le seuil jonché de chaussures laissées là par des visiteurs. La cohue est indescriptible et un guide inconnu semble soudain surgir de ce chaos pour nous entraîner vers une terrasse où la foule est encore plus dense et où l'univers paraît se résorber en un bruit assourdissant. Cymbales, cloches, gongs s'en donnent à coeurjoie, culminent en une sorte de divine cacophonie qui s'éteint brusquement, cédant la place au silence. Ils se sentent alors poussés à travers la foule, tandis qu'une voix murmure à leur oreille: "Mother, mother!" L'heure de la rencontre est venue.
    La Mère existe, la voici. Elle sourit à Arnaud, merveilleusement belle, vêtue d'un sari blanc, ses longs cheveux noirs défaits sur ses épaules, plus lumineuse que les rêves, plus réelle que tout. La voici, enfin. Il ne saurait détacher son regard de celui de cette femme dont la grâce laisse entrevoir la saveur de l'ultime. La lumière a pris corps, elle marche sur terre elle lui sourit. Il met un genou au sol, et le temps se suspend. Puis Ma se détourne et s'éloigne. "
    Le lendemain, après le darshan (moment passé en compagnie d'êtres sages et libres), tandis que Denise et Arnaud Desjardins partagent le prasad (nourriture bénie par le gourou), "Denise se croit en proie à un léger malaise et fait état de troubles de la vision. Puis, en quelques secondes, alors que retentissent les cloches du temple, la voici manifestement projetée dans une conscience autre. Eberlué, Arnaud voit soudain son épouse se redresser et ne reconnaît plus ce visage extatique. La métamorphose est totale, fulgurante. (.) C'est sidéré qu'il voit Ananda Mayi échanger avec Denise un inoubliable regard, lui laver le visage le long duquel les larmes coulent silencieusement, puis prendre sa main dans la sienne afin de l'amener dans ses appartements. (.)
    S'imprégner en toute quiétude de l'enseignement donné par sa seule existence. Deux semaines coulent ainsi à la lisière du rêve, lorsque Ma leur offre de la suivre dans un lieu où elle a coutume de faire retraite, entourée seulement d'une poignée de fidèles. Ils se rendent donc, dans son village, à Vindyachal, où ils se baignent à loisir dans sa béatifique présence."
    Arnaud Desjardins ou l'aventure de la sagesse par Gilles Farcet, Table Ronde

    Je l'ai toujours connu hors de son corps
    par Aurore Gauer


    Aussi longtemps que je me souvienne, je n'ai jamais vu son corps, ses yeux ou son sourire autrement qu'en photographie. Même ses photographies ne se sont jamais imposées à mon regard; tout au plus pouvais-je les deviner, posées discrètement dans un coin obscur d'une chambre d'ami ou dépassant derrière les livres d'une bibliothèque. Sa présence imperceptible, imprégnait les moments que je passais en compagnie des personnes qui l'avaient rencontrée de son vivant. Cela dura des années ainsi, sans question, sans besoin. Je me rends compte à présent combien a été importante cette approche indicible, naturelle, sans intention particulière. Je sais gré à ces amis de n'avoir jamais parlé d'Elle devant moi. Comme si la rencontre devait se faire hors de tous les repères habituels. Un subtil lien se créait au fond de mon être à mon insu. De jour en jour, il croissait, se développait sans que je ne fasse rien. comme un fruit qu'on laisse simplement mûrir sur l'arbre. Et puis, un jour, le fruit tombe à terre. Un moment d'évidence qui m'a prise de court.
    Comment expliquer l'urgence que j'ai ressenti, dès mon arrivée à New-Delhi qui m'a fait me précipiter dans le premier bus qui allait à Hardwar, lieu sacré entre tous, aux pieds de l'Himalaya, au bord du Gange ? C'est à travers cela qu'Elle a choisi de se manifester à moi dans toute sa force. Il a fallu que ma vie soit mise "en jeu" pendant toute une nuit pour que je réalise qu'Elle était là, qu'Elle était ce Jeu. La peur de la mort a toujours été initiatrice de ma vie, cette fois-là j'allais découvrir les tréfonds de mon âme et le point ultime où tout se résume. Dans ce bus fou lancé à toute allure dans un brouillard d'une densité rare, sur une route défoncée, glissante, trop étroite, envahie de camions tout aussi fous, nous frôlions à chaque instant la catastrophe. Mais qui s'en souciait à part moi? Les autres passagers, tous des hommes, se laissaient bercer par les soubresauts du véhicule et par la musique que déversait une radio à bout de souffle. Devant moi, un groupe de sadhus enturbannés, à moitié nus, expiraient d'épaisses fumées tandis que le conducteur, exténué, donnait des coups de volant convulsifs. Au moindre signe s'assoupissement, son second lui appliquait de grandes tapes dans le dos. Plus la nuit avançait, plus le manège devenait étourdissant. C'est ainsi que les bords de la route volaient, rythmés par les silhouettes spectrales des eucalyptus. Ce fut mon calvaire pour renaître.
    Une tension extrême me tenait en éveil, la peur suintait de tous mes pores, une rage de vie me laminait. Les images de ma vie se sont mises à défiler contre la vitre ruisselante, tous les visages de mes proches, de mes amis. A quoi s'accrocher? Qui appeler à son secours? Il n'y a pas dans ces moments-là de calcul, ni de supercherie. Nous allons au but, pour une fois! Allégés et purs comme des nouveaux-nés. Mâ, je l'ai appris plus tard, répondait toujours à ceux qui l'appelaient sincèrement à leur aide, même à distance. Sa présence étant aujourd'hui non limitée par un corps, elle est plus que jamais partout avec nous. Alors au cœur du danger extrême Elle m'a lancé Son Nom comme une fleur. Un Nom aux mille pétales d'amour, un Nom à savourer dans sa bouche infiniment, un Nom pour inverser le cours de la vie, un Nom pour reprendre courage, un Nom pour ne plus jamais se perdre: Mâ Anandamoy, Mâ Anandamoy, Mâ Anandamoy, Mâ.
    Après avoir été vidé, tout mon être aspirait à recevoir, s'émerveillait de l'instant présent et de tout ce qu'il voyait.
    C'était comme si j'étais passée du noir et blanc à la couleur, le monde se révélait dans toute sa saveur. Et un splendide soleil rouge illumina Dehraradun. Je le sus par la suite: ce fut là qu'Elle quitta son corps.
    Son Nom voyage toujours en moi..
    Aurore Gauer

    AMRITA ANANDAMAYI MA
    par le Dr Bernard Pernel


    En cette fin d'été 82, alors que Ma Anandamayi quittait son corps, le rayonnement spirituel intense d'une jeune femme née dans un village de pêcheurs au Kerela, se répand dans tout le Sud-Ouest de l'Inde.
    Elle se nomme Soudhamani (Pur Joyau), elle a 29 ans et quand elle donne son Darshan ("vision bénie du sage") dans un petit temple très ancien au bord de la mer d'Arabie, tous ceux qui se pressent autour d'elle sont saisis au plus profond de leur être par la puissance sacrée de sa danse, l'indicible beauté et les élans extatiques de son chant, incarnation divine de la Joie.
    Chaque année, Amma passe plusieurs mois en tournée à travers le monde.
    Partout son message est le même: elle incarne l'Amour universel, l'Amour inconditionnel. Son exemple vivant, le rayonnement exceptionnel et indescriptible de sa présence, semblent être le véhicule essentiel de l'enseignement qu'elle transmet.
    De nombreux occidentaux séjournent dans son Ashram au Kerel pour y suivre une ascèse rigoureuse, soutenus par l'Amour de cette Mère divine dont ils sont les enfants.
    Partout dans le monde, lors de chacun de ses Darshans, elle accueille des heures durant, dans ses bras, des centaines de personne qui fondent littéralement au feu de cet amour, et reçoivent en quelques instants la plus totale confirmation affective qu'un être humain puisse recevoir. Sans doute, certains, non identifiés à l'attraction irrésistible qu'elle déclenche, catalysés par sa présence, participent avec elle de cette même et unique réalité que l'Inde nomme Sat-Chit-Ananda, c'est à dire Etre-Conscience-Béatitude :
    "En fait cette Mère extérieure telle que vous imaginez la voir, n'existe pas. Seule existe la Mère intérieure, immobile, silencieuse, éternelle, immuable." AMMA

    Aventures intérieures
    par Ram Alexander


    Un soir à l'ashram de Vrindavan, j'étais assis avec Ma et un petit groupe de fidèles. C'était le crépuscule et l'air était lourd des senteurs de jasmin. De temps à autre, une conque sonnait parmi les cris des paons sauvages. Ma, "en majesté" résumait tous les pouvoirs de la nature. Bien qu'il n'y ait pas eu beaucoup de monde, j'étais un peu à l'écart, perdu dans mes rêveries. Une pensée me tourmentait: "Peut-être est-il temps de reprendre ma route.Après tout ma motivation n'a jamais été très religieuse. J'ai été conduit par le goût de l'aventure. Cela a été une grande aventure, mais peut-être qu'autre chose m'attend plus loin?" Tout d'un coup, se sont bousculées dans ma tête toutes les aventures possibles et imaginables.jusqu'à complète satiété! Je vis alors que l'aventure réelle se trouvait au-delà de cette fête foraine du mental. Je vis que Ma, telle Mahamaya, avait les clés de toutes les expériences de l'ego et qu'Elle était aussi la clé permettant d'accéder à l'Ultime Réalité au-delà du cinéma du monde. Mon désir de reprendre la route s'évanouit. J'étais assis en face de l'aventure ultime!
    Pendant ce temps, la nuit était tombée. Ma se leva pour aller dans sa chambre. Hébété, je la suivis, quand elle braqua sa torche électrique, juste devant mes yeux. -"Tik hai," " Ça va?" et Elle éclata de rire.
    Ram Alexander

    Vous et Moi sommes UN
    Alors que j'assistais à un darsham de Ma en 1978 à Bénarès, je cherchais à m'approcher d'elle, mais sans succès car elle était très entourée. Cependant, alors qu'elle repartait, elle est passée près de moi, s'est arrêtée et m'a jeté un long regard.
    Ses quelques mots sont encore gravé au plus profond de moi:
    "En vérité, si vous venez de si loin pour me rencontrer, c'est pour Vous rencontrer, car Vous et Moi sommes UN."
    Jean-Michel Piquemal,
    Atelier de Philosophie de Nice

    La sagesse immémoriale descend dans la rue

    Dans l'hebdomadaire trop connu France Dimanche, n° 2851 (semaine du 20 au 26 avril 2001),
    un article de deux pages, riche et approfondi, sur la sage indienne Ma Ananda Mayee. Extrait:

    Mâ Ananda Moyî a quitté ce monde en 1982.
    Un peu avant sa mort., on lui avait demandé ce qui était le plus important dans une vie.
    Elle répondit alors ceci :

    « Essayer de trouver qui je suis.
    M'efforcer de savoir ce qui a conduit à l'existence le corps que je connais.
    La recherche de Dieu. Mais avant tout on doit concevoir le désir de se connaître soi-même.
    Quand on trouve son moi, on a trouvé Dieu;
    et en trouvant Dieu, on trouve son moi. »





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