•           La

    Méditation  

    Taoïste

     

    La méditation taoïste est l'outil privilégié de notre réalisation. Elle a l'avantage de ne pas nécessiter d'effort physique particulier et peut être pratiquée par tous en adaptant les méthodes en fonction de l'état de chacun. Il ne s'agit pas ici de rentrer dans les détails alchimiques, ce sera abordé dans un article ultérieur et bon nombre de livres traitent de ce sujet indépendemment des écoles.<o:p></o:p>

    Dans le taoïsme, les méthodes de méditation peuvent se diviser en deux: l'école du nord, qui concentre ses efforts davantage sur le calme de l'esprit; l'école du sud, plus directe et plus vite concernée par la concentration sur les centres importants. Il n'y a pas une méthode meilleure qu'une autre, mais en général on dit que l'école du sud est plus rapide quoique plus risquée pour l'état du pratiquant. L'école du nord est plus lente à obtenir des résultats car elle ne brusque jamais, mais elle est exempte d'effets indésirables. Normalement, c'est l'instructeur qui donnera des conseils personnalisés, mais chacun est censé avoir des affinités pour choisir son professeur en fonction de ses propres goûts. Ici, en guise d'introduction, on ne va pas trop distinguer l'une ou l'autre, mais nous focaliser plutôt sur la posture et l'attitude de méditation. Les personnes qui ont déjà pratiqué la méditation Chan (Zen) n'ont pas besoin de lire cet essai, ils n'apprendront rien de nouveau, la méditation (assise) taoïste doit certainement beaucoup à la pratique Chan pour ce qui est de la forme.

    La méditation doit se pratiquer de préférence entre 23H et 1H00 (heure Zi) ou bien entre 5H et 7H du matin dans une pièce bien aérée, calme et sobre pour ne pas détourner l'attention.
    Néanmoins la vie citadine peut être contraignante, surtout quand on débute et que l'effort à fournir est encore important. Il vaut donc mieux nous créer les meilleures conditions pour pratiquer nos progrès n'en seront que meilleurs. N'ajoutez rien à l'effort du mental pour se concentrer et vider ses pensées, et au maintien de la posture. Si vous ne pouvez pas attendre 23H il vaut mieux se coucher et se reposer plutôt que de s'échiner en vain à ne pas s'endormir. Le résultat sera seulement que vous aurez gâché une bonne occasion de pratiquer et vous vous serz couché tard, gâchant la journée du lendemain! Même remarque pour les premières heures du matin. Bien que s'efforcer à pratiquer est bien et avantageux pour progresser, dosez l'effort par rapport à votre vie quotidienne. La méditation doit, dès le début, devenir une amie et non pas une ennemie. L'objectif est de sentir bien afin que ces moments soient recherchés autant que possible.

    1. Shen (esprit/mental):

    En général les yeux sont seulement mi-clos pour éviter de "perdre le Shen" (se distraire). L'esprit est véhiculé par les yeux, pour cela ils seront dirigés vers la pointe de son nez pour aider l'intention à faire descendre le Qi. On ne doit pas se laisser distraire par nos pensées, c'est-à-dire qu'il faut refuser de les suivre. Les pensées sont comme des vagues qui montent doucement puis déferlent avant de disparaître. Certaines méditations bouddhistes préconisent de se concentrer sur l'état avant la naissance de la pensée. Pour commencer, il me semble suffisant de ne pas se laisser entraîner par elles, ce qui est déjà un effort important. Et nous ne voulons pas fournir d'effort trop important car l'effort mental épuise le Qi et le fait stagner, tandis que notre intérêt est de le faire circuler librement. Les efforts fournis tout au long de la méditation doivent être soigneusement dosés.

    Ne pas suivre ses pensées devrait calmer l'esprit après un certain temps, mais la posture viendra de toute façon nous assister. Les pensées sont souvent comparées à un cheval lancé au galop ou à un singe facétieux. Dans le premier cas, l'idée ce n'est pas de faire disparaître le chaval, mais de le regarder galoper jusqu'à ce qu'il disparaisse au lieu de monter dessus et de se laisser promener. Si vous êtes plutôt intellectuel, ou que vous aimez lire beaucoup, j'ai l'habitude de dire que l'intellect est comme un tigre affamé. Plus vous le nourrirez de viande fraîche et plus il en voudra. Dans le processus de simplification que nous avons intérêt à entreprendre pour notre étude du Dao, il faut d'abord penser à simplifier nos pensées, ce qui passera par ne pas susciter un excès de curiosité intellectuelle qui compliquera la tâche de calmer notre esprit. Cultiver le détachement, c'est d'abord réussir à se détacher de nos propres pensées.

    Un dicton Quanzhen dit à peu près ceci: "Quand l'esprit est calme, le corps est calme. Quand le corps est calme, l'énergie aussi et elle circulera donc sans entrave".

    2. Xing (forme/corps):

    La forme correspond à la posture. La méditation peut être pratiquée (comme pour le Chan) debout [zhan] ou en marchant [xing], assis (sur une chaise, jambes croisées) [zuo], couché (sur le dos, sur le côté) [tan]. Nous parlerons de la méditation assise.

    Le dos doit être droit sans être raide, mais il est bon pour ceux qui débutent de sentir une légère tension dans le bas du dos. Il n'est pas possible que la posture soit correcte et confortable à la fois dès le départ, si bien qu'un léger inconfort est un bon signe! Repoussez le dos très légèrement vers l'arrière car durant la méditation, avec la fatigue du dos vous aurez tendance à vous pencher en avant. Le menton humble vient se rapprocher du cou, de manière à monter le haut du crâne (point Baihui) jusqu'à nous faire sentir tirés vers le haut. Il se peut aussi qu'il y ait une légère tension au niveau des cervicales. C'est bien. Les épaules sont basses mais pas de tout leur poids pour éviter que les muscles du cou ne s'étirent trop. Il peut être préférable de réhausser légèrement les épaules, par exemple en plaçant vos mains à plat sur les genoux. Ceci jusqu'à ce que vous trouviez la position du corps naturelle.
    Pour vous aider à vous asseoir le dos droit les jambes croisées, vous pouvez vous aider en glissant un petit coussin sous les fesses, de manière à avoir le périnée libre. Les jambes sont croisées dans la forme du lotus pour les chanceux qui y parviennent aussi rapidement. Les autres pourront les croiser à demi, en repliant le talon d'une jambe sur le périnée, et l'autre jambe vient se replier au-dessus.
    L'objectif est que le corps soit détendu (mis à part ces petites tensions du début mais qui ne doivent pas trop gêner). Si la posture devient vite insupportable, il est préférable d'arrêter ou de modifier la posture quitte à faire un compromis. On peut aussi bien s'asseioir sur une chaise.

    3. Yi (intention):

    Le Yi est souvent traduit par intention. En méditation, Yi est notre "concentration", c'est-à-dire notre capacité à unir notre intention et notre corps jusqu'à ce qu'ils ne fassent plus qu'un. La concentration doit être ferme mais non obsessionnelle. Dans certaines écoles, on préconise de se lancer à brûle-pourpoint dans la conduite du Qi par la concentration sur les "barrières" naturelles académiques, c'est-à-dire des centres énergétiques importants qui sont aussi des régions du corps où le Qi a naturellement tendance à s'accumuler. Le problème avec cette méthode appelée "ouverture des barrières" [kai guan], c'est qu'elle est risquée dans le cas où la concentration est obsessionnelle (le Qi va stagner), ou dans le cas où la concentration est insuffisante (le Qi va être dispersé). Cette méthode est intéressante lorsque notre esprit est calme, notre corps décontracté et notre capacité de concentration suffisante. Aussi, il vaut mieux ne déplacer le Qi que lorsqu'il sera nourri pendant un temps minimum. La tradition parle de 100 jours (environ trois mois de pratique assidue) et ma modeste expérience le confirme. Certaines personnes peuvent progresser plus vite, mais dans le taoïsme, contrairement à notre quotidien, il faut préférer la lenteur et la juste mesure.
    <o:p></o:p>

    Il est avantageux de travailler notre intention tout au long de la journée pour accroître notre capacité de concentration. En se concentrant par courtes périodes (quelques secondes à quelques minutes) sur une conversation lointaine, sur un bruit particulier au milieu d'autres, un objet particulier, notre respiration ... La règle est encore une fois de ne pas s'attarder de trop ou de fournir un effort trop intense. Il vaut mieux se concentrer cinq fois par jours pendant cinq minutes, plutôt que vingt-cinq minutes en une fois.
    Assis en méditation, ayant vidé nos pensées (c'est-à-dire ayant réussi à nous en extraire), nous nous concentrons d'abord sur le bout de notre nez, puis nous faisons descendre notre attention vers le Dantian inférieur pour les hommes, la région entre les mamelons pour les femmes (Dantian médian). Le Qi suivra notre intention et nourrir le Qi dans le Dantian ne dépendra plus que de l'assiduité de notre pratique et de notre capacité de concentration.
     
    <o:p></o:p>

    4. Qi (souffle):

    La méditation se décompose en travail du corps et en travail de l'esprit (ou conscience). Ils ne vont pas l'un sans l'autre. Dans l'école Quanzhen on appelle cela le travail simultané de la Nature (esprit) et de la Vie (énergie)
    [xing ming shuang xiu]. Comme dans la cosmogonie, où l'univers est composé d'un élément "solide", l'Essence, et d'un élément "subtil", l'Esprit, ces deux natures existent dans notre corps où elles sont inter-dépendantes. Elles sont le reflet de l'univers dans lequel nous vivons et de l'ordonnacement d'avant notre naissance. Ce sont ces natures que nous devons cultiver, d'abord indépendamment, avec une concentration et des objectifs différents, pour les réunir en un élément unique qui est appelé en alchimie le "remède". Cette unification de nos deux formes fondamentales d'énergie reproduisent l'unicité de l'énergie primordiale (appelée aussi "énergie-un" [yi qi]). Cette union est l'ingrédient principal de la méditation. Le travail se fait autour de lui. Une fois l'énergie-un obtenue sous une forme qualifiée de "grossière", il nous faut la cultiver encore et encore pendant des années pour la rendre plus subtile. Ce raffinage graduel de l'énergie primordiale [yuan qi] se fait jusqu'à ce qu'elle puisse s'unir au Dao, qui n'est donc pas une réalisation subite, mais le fruit d'un travail incessant, effectué étape après étape.
    <o:p></o:p>

    Su Yanming <o:p></o:p>

    <o:p> </o:p>





    Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique