• Agent secret de Sion,
    nom de code : Nostradamus


    Spes eivs Vnica In Sion.

    Certains historiens ont soupçonné, sans preuve évidente, Nostradamus d'être un agent secret au service des Valois. Toutefois, en étudiant sa correspondance on s'aperçoit qu'il utilisait un système de codage pour n'être compris que de ses interlocuteurs. La preuve en est cette lettre écrite par Ioannes Bergius, disciple et ami de Jules-César Scaliger, datée du 15 octobre 1563, où celui-ci lui suggère : écrivez seulement en code ce que vous pensez devoir cacher. J’ai salué pour vous tous ceux que vous m’avez demandé de saluer...
    Est-ce suffisant pour faire de lui un agent secret à l'influence prépondérante ? Les jeux de mots n'étaient-ils pas d'usage en ce XVIe siècle ? Pour définitivement le cataloguer dans un cercle secret, il faudrait un preuve plus tangible. Or cette pièce, nous l'avons. Citée anecdotiquement dans la plupart des biographies elle fait état du passage de Nostrdamus dans la ville de Turin en 1556, mais de sa signification nul de dit mot. Alors aussi muette soit-elle, nous allons la faire parler.

     

    Le Grand Maître

    Au début du XIXe siècle, un promeneur, M. Carrera, remarquait en banlieue de Turin une plaque de marbre. On y lisait : 1556 / NOSTRE DAMVS A LOGE ICI/ ON IL HA LE PARADIS LENFER/ LE PURGATOIRE IE MA PELLE/ LA VICTOIRE QVI MHONORE/ AVRALA GLOIRE QVI ME/ MEPRISE OVRA LA/ RVINE HNTIERE.
     

    Cette plaque indiquait sans doute le passage dans cette maison du célèbre voyant mais on en ignorait la raison.
    Cette relation parut effectivement dans deux articles du Courrier de Turin (n° 251 du 26 décembre 1807, p. 1177 et n° 260 du 29 janvier 1808, p. 1209). Elle signalait la curieuse inscription trouvée au-dessus de la porte d’une maison, « Cascina (ferme) Morozzo, via Michele Lessone, numero civico 68 » à une demie-lieue au nord-ouest de Turin. L'affaire fut pourtant sans suite...
    Quelques générations plus tard, en 1934, Coraddo Pagliani dans un article du bulletin municipale de la ville de Turin (Della Rassegna mensile Municipale), refit mention de l'inscription liminaire y adjoignant un cliché photographique. En France, en 1939, Charles Reynaud-Plense, dans une nouvelle édition des Centuries, reproduisit le document, sans plus de commentaire...
    Et pourtant cette plaque est une des seules preuves matérielles, et d'un passage de Michel de Nostredame dans cette ville, et surtout d'une marque importante dans sa quête initiatique. Car à Turin, en l'an de grâce 1556, on le reçut en maître...
    En 1555, ayant publié son almanach pour l'année et ses premières Centuries, Nostradamus est déjà célèbre. Au mois d'août, le roi Henri II le reçoit à la cour. Après une brève entrevue, il repart incognito nanti d'une maigre récompense, mais la puissante, la redoutable reine Catherine de Médicis restera toujours en contact avec lui. Elle le consultera à plusieurs occasions.
    Des voyages en Italie, Nostradamus en a effectué plus d'un, mais celui-là est, sans doute le plus prestigieux. En 1556, à Turin, qui deviendra trois ans plus tard capitale de la Savoie, il va être institué Grand maître dans l'Ordre du très secret Prieuré de Sion.
    Cette plaque, découverte par M. Carrera, était citée sans commentaires par des biographes ne sachant l'interpréter. En 1993, un hasard heureux, suite à la lecture de L’Enigme Sacrée, allait me mettre sur la voie. Les auteurs de cet ouvrage admettent qu’un cercle très fermé a présidé à l’installation de l’Ordre du Temple lors de la prise de Jérusalem par Godefroi de Bouillon en 1099. Cet ordre lié intimement avec ce dernier jusqu’en 1188 a pris plusieurs dénominations : Prieuré de Sion, Ordre de Sion, Ormus et Ordre de la Rose-Croix Veritas (les 13 membres au sommet de la hiérarchie se nomment encore actuellement les treize Rose-Croix). De sa création à 1188, l’Ordre du Temple et le Prieuré de Sion eurent les mêmes Grands maîtres.
    A partir de 1188, il y a scission, les deux Ordres se séparent. Tout en donnant dans leur livre la liste des Grands maîtres qui se sont succédés jusqu’en 1963, les auteurs remarquent que les deux sources dans lesquelles ils ont puisé leurs informations diffèrent sur un seul Grand maître, qui présida à la destinée de l’ordre de 1527 à 1575, Ferdinand de Gonzague, et ajouterai-je, bizarrement il est contemporain de Nostradamus. Voici le texte : « Nous nous sommes trouvés, avec lui, confrontés à la seule information manifestement fausse de tous les « documents du Prieuré ». Selon la liste des Grands maîtres de Sion figurant dans les « Dossiers Secrets », Ferrante (Ferdinand de Gonzague) aurait en effet présidé aux destinés de l’ordre jusqu’à la fin de sa vie en 1575. Or selon d'autres sources, il serait mort près de Bruxelles en 1557, dans des circonstances peu claires il est vrai, et pouvant laisser croire qu’on l'avait seulement cru mort ... »
    Ils ajoutent : « C'est pourquoi nous ne pouvons nous empêcher de penser qu'il ne s'agit pas en l'occurence d'une erreur, mais plutôt d'un moyen déguisé de transmettre un message important, car dans le n° 4 de « Circuit » (une des dénominations de la revue du Prieuré), on peut lire ce petit message bien étrange … »
    Message reçu... Ce message restera énigmatique pour les auteurs de ce livre, il n’en sera pas de même pour nous si nous nous remémorons l'inscription de Turin. En voici le texte : «... Ferrant devait mourir le 15 novembre 1557, mais déjà destitué par le convent de Turin en 1556, son remplacement n'avait posé aucun problème. Michel devait pendant dix ans marquer le destin du monde. Sa mort sema pendant neuf ans la discorde dans l’Ordre, et l'interrègne fut assuré par le « triumvirat », dont Nicolas Froumenteau et le duc de Longueville étaient les dignitaires ...»
    Ce Michel n’est autre que Nostradamus qui mourut effectivement dix ans plus tard en 1566 (le 1er juillet). Les termes employés sont sans équivoque, relevons-les : « son remplacement n'avait posé aucun problème », à cette date le nom de Nostradamus circulait dans toutes les cours d’Europe; « marquer le destin du monde », en effet il a rédigé ce destin pour cette époque et celles futures grâce à ses prophéties. Sa mort a provoqué une rupture ou un schisme dans l’Ordre et l’on imagine aisément pourquoi. Qui aurait l’audace après lui, d’occuper le siège périlleux.
    Ce petit texte ne nommant que deux personnages du triumvirat, il nous fallait rechercher le troisième. Son nom est donné dans l’une des planches généalogiques au début du livre : Les ducs de Guise et de Lorraine (d’après l’ouvrage de Philippe Toscan du Plantier). Il s’agit vraisemblablement de Charles de Guise (1525-1574), cardinal de Lorraine, désigné comme régent du Prieuré de Sion en 1557.
    Cette hypothèse de Nostradamus Grand maître du Prieuré de Sion s'est transformée en certitude à la découverte, en 1995, d'un article signé Pierre Plantard de Saint-Clair paru dans un hors-série de Nostra en janvier 1983 : « C'est à Turin, en 1556, que Nostradamus est initié au grand secret des temps à venir ... Mais ce n'est qu'en 1556 que, devenant un Grand maître de l'ordre [il ne cite pas lequel], ce grand secret lui fut confié.. » et l'envoi final qui ne peut laisser aucun doute par les termes qu'il emploie « Voici donc le message du sage poète de Salon-de-Provence, qui a perpétué par ses écrits les secrets de l'hermétisme au-delà des siècles jusqu'à nous, nous annonçant le Paradis, l'Enfer ou le Purgatoire... » Pierre Plantard était à cette époque Grand maître du Prieuré de Sion (1980-1984). Il savait le lien qui unissait cette plaque de marbre et Nostradamus dont il connaît l'œuvre littéraire. De nombreux documents ou récits publiés dans l'Enigme Sacrée émanent de lui.
    Les auteurs de L'Enigme Sacrée énumèrent 27 Grands maîtres mais n'en nomment que 26. Il faut donc bien comptabiliser Michel de Nostredame comme l'un des leurs.
    Jean de Gisors, le premier de la liste, fut élu le 15 août 1188, fête de Notre-Dame. De 1188 à 1963, l'ordre compta 27 Grands maîtres, les hommes portaient le nom de Jean; les femmes, Jeanne; leur titre : Pasteur et Nautonnier. Remarquons que le pape Jean XXIII incarnait la 107e devise Pastor et Nauta de la Prophétie des papes attribuée à saint Malachie. Il y eut donc deux Jean XXIII contemporains, décédés la même année : l'un Grand maître du Prieuré de Sion, Jean Cocteau (1918-1963), l'autre souverain pontife, Angelo Roncalli (1958-1963). Ce dernier, dans sa prophétie qui fut publiée treize ans après sa mort par Pier Carpi, est dit avoir été initié en 1935 en Turquie dans l'ordre de la Rose-Croix.





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