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LE CATHARISME VOIE MYSTIQUE DU CATHARISME
Le Catharisme : Voie mystique du
Christianisme
Bertran de La Farge
Chers amis,
Réjouissons-nous d’être aujourd’hui assemblés au coeur de cette magnifique vallée d’Ariège qui s’étend de
Roquefixade à Montségur et qui est imprégnée de l’histoire et de l’esprit du Catharisme. Réjouissons-nous de cette
première rencontre. Réjouissons-nous en particulier de son caractère informel. Ce caractère informel est très
précieux et important car il est l’un des éléments qui vont nous permettre de ne pas nous enliser et de progresser,
maintenant et à l’avenir. En effet, si, pour ce qui nous intéresse et nous réunit aujourd’hui, les formalismes ont
quelques vertus, ils conduisent trop souvent à des débordements tels que ceux que nous avons pu observer et
expérimenter amplement à la lumière des 64 années qui viennent de s’écouler autour du Catharisme, en particulier
en France, depuis 1945.
Au cours de cette période, nous avons vu se dessiner une épopée cathare nouvelle et se succéder, avec des fortunes
diverses, des chercheurs exprimant différentes facettes, perceptions et lumières du Catharisme tels que René Nelli,
Déodat Roché, Christine Thouzellier, Jean Duvernoy, Michel Roquebert, Anne Brenon, et bien d’autres, car il n’est
pas possible d’être exhaustif. Il y eut aussi tous leurs compagnons, amis, disciples, continuateurs, compilateurs,
thuriféraires, érudits, experts, et sympathisants, tels que, par exemple Simone Weil, Jean Blum, Antonin Gadal,
Emmanuel Leroy-Ladurie, Philippe Roy, Jordi Ventura i Subirats, Henry Corbin, Henri Gougaud ; et puis tous ceux de
la Société d’Études et du Souvenir cathares de Déodat Roché et de Lucienne Julien ; et puis tous les pionniers et
bâtisseurs du Centre National d’Études Cathares René Nelli ; et puis toutes les diasporas et tous les pérégrinateurs
solitaires éparpillés à Toulouse, à Mazamet, en Ariège (à Roquefixade, Ussat, Montségur), mais aussi, de par le
monde et entre autres, en Italie, en Catalogne, en Hollande, en Belgique, en Suisse, en Suède, en Allemagne, aux
États-Unis, en Bosnie, en Croatie, en Bulgarie…
Le thème de cette rencontre est la diversité cathare. Cette diversité, qui est une réalité, implique qu’il y a plusieurs
manières, chacune étant respectable, de s’intéresser au Catharisme, de le concevoir et de l’exprimer. Nous savons
bien qu’il y a mille façons différentes d’aborder, de concevoir, d’assimiler et de pratiquer le Catharisme. Il y a des
historiens, des archéologues, des philosophes, des chercheurs de spiritualité, des esthètes, de simples curieux.
Chaque point de vue doit être écouté avec bienveillance et tolérance. L’incompréhension peut aussi bien venir de
l’orateur que de l’auditeur. Il faut laisser le temps aux idées de faire leur chemin, les faire murir, les perfectionner,
les comparer. Nous devons aussi nous habituer à remettre nos hypothèses personnelles en cause : sans cesse sur le
métier remettez votre ouvrage, polissez-le sans cesse et le repolissez…
Il faut aussi comprendre qu’à l’intérieur de chacune de ces disciplines il y a des inégalités de pratique, de
compréhension et de perception. Les historiens n’ont pas tous la même analyse. Les adeptes de la spiritualité ne
lisent pas, ne comprennent pas et ne pratiquent pas tous en même temps le même chapitre de l’enseignement
mystique chrétien cathare. Là aussi tolérance, indulgence, bienveillance et patience sont indispensables.
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t L’ESPRIT EST IMMORTEL
Il n’existe aucune survivance ésotérique ou exotérique, tout aussi mystérieuse qu’hypothétique, à travers les siècles,
d’une organisation cathare temporelle, souterraine et clandestine. Il n’existe pas non plus, et il n’a jamais existé,
d’initiation cathare occulte, réservée à quelques initiés privilégiés. Mais il n’appartient pas aux Hommes de décider
de l’existence ou de l’inexistence, de la survivance ou de l’anéantissement de l’Esprit. L’Esprit est immortel et les
réalités spirituelles sont éternelles, intangibles et indestructibles, quels que soient les Hommes, leurs volontés, les
époques et les circonstances. Ainsi de même que toute idée et tout enseignement émis à toute époque, tout au
long de l’histoire de l’Humanité, peut à tout moment être perçu ou considéré comme étant toujours, ou à nouveau,
juste, pertinent, séduisant, convainquant et d’actualité, de même la perception cathare de l’Esprit du Christianisme
est-elle toujours vivante et peut-elle paraître juste, lumineuse et adéquate aux yeux de ceux qui en prennent
connaissance aujourd’hui et qui découvrent qu’elle est une réponse claire à leur quête spirituelle, qui jusque là était
restée vaine.
t FAIRE L’INVENTAIRE DE NOS POINTS COMMUNS
Mettons nos éventuelles ou inévitables divergences au vestiaire. Cherchons en priorité ce qui nous unit, afin de le
clarifier et de le faire fructifier. Ce but atteint les divergences et les incompréhensions que nous aurons mises de
côté auront trouvé leurs évidentes et heureuses solutions. Et nous pourrons alors vraiment aller de l’avant. Mais il
faut que nous réalisions d’abord que nous n’allons pas tout élucider au cours d’une première rencontre de 48
heures. Il nous faudra beaucoup d’humilité, de sérénité, de tolérance, de curiosité, et surtout d’autres rencontres,
régulières et, j’insiste, informelles et génératrices de réflexions, de découvertes et de redécouvertes, avant de
parvenir à retrouver la substantifique moelle et la compréhension et la pratique correcte du Catharisme.
Nous allons échanger des idées pendant 48 heures. Sachons faire la part des choses en séparant et en distinguant
nos opinions personnelles initiales et les premières synthèses de points communs auxquelles nous allons, espéronsle,
parvenir à l’issue de cette première rencontre.
Ayons en particulier ce point important en tête : dans le Christianisme cathare il n’y a pas de dogmes ! Il n’y a pas de
lettre intouchable. Cette rencontre n’est pas un concile destiné à proclamer des vérités intangibles. Aussi et surtout,
n’allons pas croire que chacun de nous repartira d’ici avec la certitude que tout a été définitivement dit et établi et
qu’il peut désormais répandre ce qu’il pense être une bonne parole ou pire, « la Vérité » cathare. D’autres
nombreuses rencontres seront nécessaires avant que nous soyons sûrs de disposer d’un fond commun admis et bien
compris.
À partir de maintenant, mon propos va être d’apporter des pierres à l’édifice que nous allons nous efforcer de
commencer à construire ensemble pendant les mois et les années qui viennent, et, pour ce faire, de mettre sur la
table, d’apporter à nos agapes intellectuelles communes quelques réflexions accumulées et polies au cours des
années maintenant écoulées.
t TOUT D’ABORD VOICI DES MANUSCRITS CATHARES
Les propos qui vont suivre sont principalement étayés par les documents suivants, en particulier par des Manuscrits
considérés comme authentiquement cathares : Le Traité de Barthélémy de Carcassonne ; le Manuscrit de Lyon ; le
Rituel de Turin et le Manuscrit de Dublin, ainsi que le Livre des deux principes de Jean de Lugio et Interrogatio
Johannis, la Cène secrète, attribuée au Bogomile bulgare Jérémy. Il y a aussi certains registres et traités émanant
d’Inquisiteurs tels que : Alain de Lisle, Rainier Sacconi, Moneta de Crémone, Jacques Fournier (le pape Benoît XII) et
Juan de Torquemada (Bosnie). Nous avons aussi suivi et vérifié la logique des exégèses cathares à travers diverses
traductions et éditions de la Bible, en particulier du Nouveau Testament, en différentes langues, et aussi le petit livre
intitulé « La Didaché », attribué aux Apôtres. Sans oublier quelques apocryphes : la Vision d’Isaïe, les Évangiles de
Thomas, Marie, Philippe et… Judas.
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t AVANT TOUTE AUTRE CONSIDÉRATION : LES CATHARES SONT DES CHRÉTIENS.
Le Catharisme est l’un des courants du Christianisme. Il n’est pas autre chose. Il n’est pas une religion à part.
Le Christianisme est fondé sur ses Écritures, sur « le Livre » du Nouveau Testament qui est le recueil, par les premiers
disciples et apôtres du Christ, de l’Enseignement du Verbe de Dieu. Tous les Chrétiens, qu’ils soient Catholiques,
Orthodoxes, Protestants, Évangélistes, Baptistes, Coptes, Nestoriens, Syriaques, Arméniens, Maronites (etc.) ou...
Cathares se réfèrent au même Nouveau Testament qui existe depuis près de vingt siècles. Pour tous, la « Parole de
Dieu » enseignée par le Christ est toujours en vigueur. Elle décrit une Voie mystique aboutissant à la réintégration de
tout être en Dieu. Cette Voie qui n’est ni matérielle ni institutionnelle a existé et existe sans interruption depuis
l’époque du Christ jusqu’à nos jours. Elle est toujours là, latente, toujours disponible, toujours praticable et toujours
pratiquée et elle n’a nul besoin d’institutions pour exister et pour se manifester. Ainsi la Voie mystique des Chrétiens
cathares est-elle ouverte en permanence à tout « Pérégrinateur » qui souhaite s’avancer, seul ou accompagné, sur le
Chemin tracé pour tous, par le Christ, et aboutissant à l’Amour absolu (Agapê).
t LE CATHARISME EST UNE RELIGION
Il est avant tout une Religion. Nous allons donc parler de Religion. L’historiographie est certes une facette très
importante du Catharisme, mais elle pose des limites dans le temps qui ne sont liées qu’à la disponibilité ou qu’à la
non disponibilité de documents sources. Aussi n’est-elle qu’accessoire car elle ne rend pas compte de l’élément
majeur du Catharisme qui est d’être une religion et, qui plus est, d’être une religion dont la quête centrale est
mystique.
t LE CATHARISME EST UNE VOIE MYSTIQUE DU CHRISTIANISME
Cette Voie est fondée en priorité sur le Nouveau Testament, « le Livre du Christianisme ». La principale
caractéristique de cette « Voie » est d’être l’une des facettes, l’un des courants éminemment mystique de la religion
chrétienne. Cette Voie expose le contenu et le sens spirituels du Christianisme tel qu’ils ont été et qu’ils sont
compris, pratiqués et professés par des Chrétiens en Quête de l’Enseignement mystique du Christ. Parmi ces
« Pérégrinateurs », certains furent appelés « Cathares », entre le Xe et le XVe siècles. Pour eux, il s’est agi de
comprendre le modèle de vie mystique présenté par le Christ comme l’aboutissement naturel de toute trajectoire
humaine et de découvrir et comprendre le chemin universel proposé et tracé par le Christ porteur du Verbe
annonçant aux Hommes la Bonne Nouvelle (l’Évangile) de leur Salut.
t LES CARACTÉRISTIQUES PRINCIPALES DU CATHARISME SONT AU NOMBRE DE CINQ
(1) Le Catharisme est une religion ; (2) Les Cathares sont des Chrétiens ; le Catharisme étant l’un des courants du
Christianisme ; (3) Ils sont monothéistes et observent le seul dualisme défini et contenu dans l’Évangile ; (4) Le
Catharisme est l’une des voies mystiques du Christianisme, fondée sur le Nouveau Testament. Les Chrétiens
cathares, tout en vivant leur vie sociale et matérielle quotidienne, quelle qu’elle soit, s’efforcent de parvenir à un
contact spirituel permanent avec Dieu en suivant l’enseignement de l’Évangile qui dit que « Dieu est en chacun
d’entre nous, notre corps étant le Temple de Dieu vivant » ; (5) Les Cathares sont opposés à toute théocratie ou, plus
précisément à l’exercice concret des pouvoirs temporels et politiques par la religion et par quelque institution
religieuse, quelle qu’elle soit, prétendant exercer un contrôle, une contrainte, un pouvoir et une hégémonie sur la
société et sur les personnes. Logiquement et inversement le temporel n’a pas à s‘immiscer et à s’imposer dans le
spirituel et dans les consciences individuelles et collectives.
L’une des clés du Christianisme cathare, respectueux de l’Homme, consiste à vivre une immersion tolérante et
solidaire au sein de la société, au vu, au su et au service de tous et en toute liberté.
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t AU CONTACT DE DIEU
Cette Voie, à la fois individuelle et solidaire, énonce que tout Être humain peut vivre sa vie quotidienne au contact
spirituel de Dieu, sans qu’il soit besoin ni d’institutions hiérarchisées, ni de structures matérielles, ni de
problématiques et contestables filiations humaines pour suivre le Chemin tracé par le Christ. L’ensemble des
manuscrits cathares parvenus jusqu’à nous décrivent comment cela est possible.
Nous allons maintenant passer en revue les différentes caractéristiques et les différentes pratiques de la religion
chrétienne telle que la définissent et la pratiquent les Chrétiens cathares.
t MONOTHÉISME
Il est important de souligner le fait suivant : les Chrétiens cathares sont intégralement monothéistes : ils croient en
un seul Dieu !
« Nous honorons au plus haut point le Dieu suprême et vrai, le Père tout-puissant par qui – comme nous le lisons
dans les Écritures* et comme nous le croyons – ont été faits le ciel, la terre, la mer et tout ce qui y est compris
(Psaume 145, 6), selon ce que confirment les témoignages des Prophètes et que démontrent plus complètement
encore les autorités du Nouveau Testament… Par les témoignages des Écritures, aussi nombreux que possible, nous
croyons que Dieu tout-puissant a fait et aussi créé, le ciel, la terre, la mer, le monde et tout ce qui s’y trouve ».
(Barthélemy) « C’est Dieu qui a fait la terre et qui a créé l’Homme pour l’habiter » (Isaïe 45, 12). (Traité de
Barthélemy de Carcassonne (vers 1222) « Barthélemy aurait été le représentant officiel en Languedoc d’un antipape
cathare résidant en Bosnie » [René Nelli])
*Les Écritures sont d’une part le recueil, écrit par les apôtres et les disciples, des préceptes du Verbe de Dieu exprimés par le
Christ, envoyé (Messie) de Dieu et d’autre part des fractions acceptées de l’Ancien Testament, tels que les Psaumes et les livres
sapientiaux. Ces Écritures, avant tout le Nouveau Testament, ont été appelées « Bonne Nouvelle » (Évangile) par le Christ.
Dieu, par son Verbe porté par le Christ, s’adresse aux Hommes par son Verbe qui leur livre des préceptes leur
montrant le Chemin de l’Éveil et du retour : « Il faut que j’annonce la Bonne Nouvelle du Royaume de Dieu car c’est
pour cela que j’ai été envoyé ». Je Suis venu dans le monde pour y jeter un Feu. Je veux qu’il s’y propage, alors je
l’attise pour qu’il l’embrase tout entier et ne cesse de le brûler. (Luc 4, 43 ; 12,49 ; Thomas 10) « Les yeux de votre
chair ne peuvent pas voir l’avènement du Royaume de Dieu. Aussi ne dites pas : regardez, le Royaume est ici ou,
regardez, il est là. Car, en vérité, le Royaume de Dieu est en vous-mêmes. » « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie ;
nul ne va au Père que par moi. » (Évangiles de Luc 4, 43 ; 8, 1 ; 17, 20-21 ; Jean 14,6)
t DUALISME
« Il y a deux principes : le premier, le souverain Bien, le Dieu de Lumière, est celui des choses spirituelles et
incorporelles ; le second, le souverain mal, le dieu des ténèbres, est celui des choses corruptibles et corporelles ou
visibles » (Jean de Lugio).
Δ L’ARBRE QUI CACHE LA FORÊT…. Le dualisme exerce une certaine fascination sur nombre de fidèles et d’amis
du Catharisme. Mais la raison principale de la présence appuyée du dualisme dans la mythologie cathare réside sans
doute, avant tout, dans le fait que le dualisme a été l’accusation majeure et décisive des inquisiteurs contre les
Cathares, accusation jadis abondamment étayée et instrumentalisée par Saint Augustin qui reliait dialectiquement
dualisme et manichéisme et qui faisait jurisprudence. Le soupçon et l’accusation de dualisme et de manichéisme
suffisaient pour envoyer le suspect au bûcher. Et l’inquisition ne s’en est, évidemment pas, privé. Soyons clairs : les
cathares, comme tous les chrétiens, sont à la fois dualistes et monothéistes ! Ce qu’il faut surtout souligner avec
force, c’est que le dualisme des cathares n’est en réalité que celui du christianisme en général. Le catharisme n’est ni
plus ni moins dualiste que ne l’est l’enseignement évangélique du Christ qui mérite d’être relu sous cet angle-là. Car
un dualisme bien réel est indubitablement présent et affirmé dans la Bible (L’Ecclésiastique 33, 15 ; Deutéronome 30,
15-19) et dans le Nouveau Testament :
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Face au mal, le Bien.
Face à la mort, la Vie.
Face au pécheur, le Juste.
Considère de même toutes les oeuvres du Très-Haut :
Elles vont deux par deux, l’une s’oppose à l’autre.
Regarde, J’ai mis devant toi la Vie et le Bien,
ainsi que la mort et le mal.
C’est pourquoi il faut que tu choisisses
la Vie et le Bien.
Δ L’ÉVANGILE. Dans l’Évangile selon Matthieu, Jésus dresse un véritable tableau qui, d’une part, constitue la clef de
la parabole du bon grain et de l’ivraie et qui, d’autre part, nous indique que ses paraboles contiennent une
interprétation et une signification profondes que les auditeurs sont invités à rechercher et à comprendre :
Celui qui sème le bon grain, c’est le Fils de l’Homme.
le champ, c’est le monde.
le bon grain, ce sont les enfants du Royaume.
l’ivraie ce sont les enfants du malin.
l’ennemi, qui l’a semée, c’est le diable.
la moisson, c’est la fin du monde.
les moissonneurs, ce sont les anges.
« Et comme on arrache l’ivraie pour la jeter au feu, ainsi en sera-t-il à la fin du monde. Le Fils de l’Homme enverra ses
anges qui enlèveront de son Royaume tous les scandales et ceux qui font le mal, et les jetteront dans la fournaise
ardente. Là seront les pleurs et les grincements de dents. Alors aussi, dans le Royaume de leur père, les Justes
resplendiront comme le soleil. À bon entendeur d’entendre » ! (Matthieu 13, 24-43). Comprenons bien qu’il ne s’agit
pas d’un manuscrit cathare. Il s’agit de l’Évangile et c’est bel et bien la Parole du Verbe de Dieu, portée par le Christ
qui est ici rapportée et transcrite par Matthieu, l’Apôtre évangéliste.
Δ JÉSUS PARLE DU DIABLE. Il est évident que c’est bien le Christ lui-même, et pas des manichéens, qui décrit ici un
véritable dualisme où apparaissent, on ne peut plus clairement, le Fils de l’Homme, le diable, les anges, les scandales
(les persécutions), les enfants du Royaume et les enfants du malin, ceux qui font le mal. Ne dit-il pas, selon Jean,
l’autre Apôtre évangéliste (8,44) : « votre Père, c'est le diable, et vous voulez vous conformer à ses désirs. Depuis le
Commencement, c'est un meurtrier : il ne se tient pas dans la vérité, parce qu'il n'y a pas de vérité en lui. Lorsqu'il
ment, il parle de son propre fond, puisqu'il est menteur, lui le père du mensonge. » Propos forcément très cathares,
mais d’abord tout simplement très chrétiens !
Δ LA DIDACHÉ. La Didaché est un petit recueil daté vraisemblablement du Ier siècle et qui aurait été utilisé par les
Apôtres. La Didaché énonce qu’ »il y a deux chemins, celui de la Vie et celui de la mort. Mais il y a une grande
différence entre les deux chemins » :
(a) Voici le Chemin de la Vie : en premier lieu tu aimeras le Dieu qui t’a créé ; en second lieu tu aimeras ton prochain
comme toi-même et, tout ce que tu ne voudrais pas qu’on te fît, ne le fais pas non plus à autrui.
(b) Voici le chemin de la mort : avant tout il est mauvais et plein de malédictions : meurtres, adultères, convoitises,
impudicités, vols, idolâtries, pratiques magiques, bénéfices, rapines, faux témoignages, hypocrisies, mauvaise foi,
ruse, orgueil, méchanceté, arrogance, cupidité, langage obscène, jalousie, présomption, dédain, forfanterie ;
persécutions des bons, haine de la vérité, amour du mensonge, méconnaissance de la récompense de la justice,
indifférence au bien et au jugement juste, attentif non pas au bien, mais au mal, éloigné de la bonté et de la
patience, amoureux des vanités, courant après la rétribution, sans pitié pour le pauvre, sans compassion pour ceux
qui sont accablés, ignorants de Celui qui les a créés ; il y a aussi les meurtriers d’enfants, les corrupteurs de l’oeuvre
de Dieu, ceux qui se détournent de celui qui est dans le besoin, ceux qui accablent celui qui est dans les tribulations,
sans oublier les avocats des riches et les juges iniques des pauvres rendus coupables de tous les péchés. Enfants,
fuyez tous ces gens-là ! »
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Il est intéressant de remarquer la similitude du contenu de la Didaché avec celui des thèses du Parfait cathare Jean
de Lugio ainsi qu’avec celui des Épîtres de Paul et de Pierre.
Δ « SUR LA TERRE COMME AU CIEL ». Barthélemy de Carcassonne distingue « les deux mondes » où évolue
simultanément et/ou successivement l’être humain :
LE MONDE VISIBLE, CORRUPTIBLE ET PÉRISSABLE, le « monde de l’exil », « ce présent monde », mauvais, malin et
tout entier posé dans le mal » (I Jean 5, 19). C’est « le monde du mélange », la « terre d’exil », la « terre de l’oubli ».
C’est le monde de la tentation dont parle l’Apôtre, Paul : « Lorsque vous étiez morts par les dérèglements et les
péchés dans lesquels vous avez vécu selon la coutume de ce monde » (Éphésiens 2, 1-2).
L’AUTRE MONDE où les créatures sont incorruptibles et éternelles, dans lesquelles consistent notre joie et notre
espérance ». Cet autre monde, c’est « la Terre bonne » que Dieu a créée dans le Commencement » (l’Alpha).. Ce
sont aussi, dit Barthélemy, les Cieux dans lesquels la Justice habite et où Dieu a jugé bon de placer sa résidence, et
où le Christ, par sa bouche, apporte le témoignage du Verbe émané de Dieu qui dit : « Notre Père qui es aux Cieux ».
C’est le Royaume des Cieux, le Royaume de Dieu, le Royaume du Père, le « Royaume qui n’est pas de ce monde »,
avec sa Terre bonne, immatérielle ; ses « Cieux nouveaux » ; sa source d’Eau Vive. C’est « la Terre Nouvelle » et le
« Ciel Nouveau » qui sont la destination finale de tous les Hommes qui parviennent à la Bonne Fin (l’Oméga).
LE VERBE DE DIEU est venu dans le monde visible, la « terre d’oubli », et auprès de ses habitants qui sont
corruptibles et frappés d’amnésie pour leur « rappeler » que la suite de leur destinée, de leur trajectoire dont ils
avaient perdu le souvenir et la conscience (c’est cela « la chute »), consiste à s’affranchir de la corruption du
« siècle » (celle du monde visible et corruptible ) qu’il qualifie de « mort », et à « réintégrer » « l’autre monde »:
Δ CES DEUX MONDES COEXISTENT SIMULTANÉMENT ET EN PERMANENCE. L’un dans la matière, l’autre dans
le divin. « L’Histoire naturelle » des Hommes fait que tout Homme va vivre à la fois simultanément et
successivement sur ces deux mondes qui, d’une certaine façon, sont inéluctablement solidaires..
Δ IL Y A ANTAGONISMES PERMANENTS entre les penchants de l’Homme liés à ses « principes » et fonctions
diamétralement opposés que sont d’un côté, dans le monde de la matière, les pulsions physiologiques et psychiques
présentes dans son corps animal corruptible, ce que nous appelons « les tentations », sources du mal, et de l’autre
côté, dans l’autre monde, où n’existe que le Bien et les attractions croissantes, appelons-les « amours », de son
« esprit » incorruptible vers la grande force de l’Amour qui est Dieu. Entre les deux l’Homme balance. Favoriser ou
vivre pour l’un éloigne de l’autre. Sa destinée le conduit à gravir les échelons de l’échelle de Jacob, celle qui conduit
au Paradis, et à commencer par satisfaire ses pulsions animales, puis ses orgueils psychiques, puis à prendre
conscience de l’appel que l’Amour divin exerce sur son Esprit et qui va l’entraîner vers sa réintégration dans l’Unité
divine. Comment exprimer ces antagonismes et quelle est la façon de s’en affranchir, lorsque l’on balance entre la
lettre et l’esprit d’une « leçon de choses » et que l’on s’adresse à des publics aux cultures hétérogènes ? Barthélemy
de Carcassonne, citant l’apôtre Jacques, l’exprime ainsi : « âmes adultères, ne savez-vous pas que l’amour pour ce
monde est une inimitié contre Dieu ? Quiconque veut être ami de ce monde se rend ennemi de Dieu » (Jacques 4,
4). « Bien-aimés, je vous exhorte, comme étrangers et voyageurs sur la terre, à vous abstenir des convoitises
charnelles (éros) qui font la guerre à l'âme (Agapê)» (I Pierre 2, 11) C’est ainsi que dans l’Apocalypse, il est écrit
que : « Ceux qui ne sont pas chastes seront jetés hors de la Cité sainte ». Autant d’expressions crues mais propres à
cette époque et que nous pourrions exprimer plus simplement aujourd’hui : « L’attrait pour le sexe fait obstacle à la
quête de l’Esprit et inversement ».
MANUSCRIT DE LYON. RITUEL DE LA CONSOLATION. Aux Parfaits il est prescrit d’être chastes : « Vous devez
comprendre qu’il faut que vous aimiez Dieu avec toutes les bonnes vertus et avec vérité, douceur, humilité,
miséricorde et chasteté. Il est écrit que la chasteté rapproche l’Homme de Dieu mais que la corruption l’en
éloigne. Chasteté et virginité sont très voisines de l’état angélique. La pureté rapproche de Dieu. Mais prenezgarde
car « c'est du Coeur que sortent les mauvaises pensées, l’adultère et la passion pour les plaisirs de la chair, et
c'est cela qui souille l'homme ». Et dans le livre de Sagesse il est écrit : « Celui qui se consacre aux plaisirs de la chair
perdra son âme par manque de Coeur » (Matthieu 5,27-28 ; 15, 19-20 ; Proverbes 6,32). Aussi convient-il que tu ne
t’attaches pas à ce monde et à ses oeuvres, ainsi que les choses qui sont de lui. Car saint Jean dit dans son Épître :
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« Mes très chers, n’aimez pas le monde, ni les choses qui sont dans le monde. Si quelqu’un aime le monde, l’Amour du
Père n’est pas en lui. Car tout ce qui est dans le monde est convoitise de la chair et des yeux et orgueil de la vie, qui
n’est pas du Père, mais qui est du monde. Le monde passe et sa convoitise aussi, mais qui fait la volonté de Dieu
demeure éternellement » (I Jean, 2,15-17). Ces recommandations s’adressent aux Parfaits et cet état de « chasteté »
doit être vrai et spontané ; toute simulation et tous faux semblants étant révélateurs de tartufferie, de puritanisme
ou d’une position de « gourou », toutes choses totalement incompatibles avec l’état de Parfait.
UN GRAND MALENTENDU SÉMANTIQUE. Le mot « Dualisme » associé au mot « cathare » a convoyé, tout au long
des deux derniers siècles un gigantesque malentendu sémantique qui a produit des certitudes doctrinales difficiles à
corriger. C’est ainsi que le sens donné au mot « Dualisme » est incorrect. C’est ainsi que l’on a mélangé et rendu
confuses les notions de « dualisme » et de dithéisme ». Le « dithéisme » est la croyance en deux dieux,
généralement un Dieu du Bien et un dieu du mal. C’est le cas du Mazdéisme. Le dualisme est la croyance en deux
principes : un principe du Bien et un principe du mal, chacun ayant ses appellations et ses mythologies. Pilar Jiménez
Sanchez, souligne que la croyance en l’existence de deux principes éternels et opposés, (un principe du bien et un
principe du mal), à l’origine de deux créations, la bonne et la mauvaise, n’a été, (chez les cathares) ni originelle ni
majoritaire ; elle n’a pas été non plus la croyance dominante chez les Bons hommes du Midi et son influence ne
pénètre probablement le milieu cathare que vers la fin du XIIIe siècle.
LA RÉALITÉ EST QUE LES CATHARES SONT MONOTHÉISTES : ils croient en un seul Dieu qui a créé les deux mondes
dont nous venons de parler. Et cette notion n’a rien d’extraordinaire. Nous admettons bien qu’il y a notre existence
physique qui se déroule dans notre univers visible à l’aide du véhicule qui est notre corps physique. Et nous
admettons aussi que nous avons sans doute une âme et un esprit qui sont immatériels et probablement immortels
et que cette immortalité se déroule dans un endroit immatériel et invisible. Nous admettons aussi qu’à chaque
seconde de notre vie actuelle notre corps et notre âme vivent simultanément dans les deux mondes distincts et
complémentaires, visible et matériel d’un côté et invisible et immatériel de l’autre. L’autre facette de la réalité est
que, ayant admis que ces deux mondes sont la création d’un seul Dieu, COMME LE RELATENT TOUS LES
MANUSCRITS CATHARES CITÉS PLUS HAUT, des choses différentes s’y déroulent ; dans le monde matériel il y a la
violence, le mal. Dans le monde de l’esprit, il semble que ne puisse exister que le Bien. C’est cela qui détermine le
dualisme. À ce dualisme-là, les Cathares croient. Mais tous les autres Chrétiens y croient aussi, car ce dualisme est
abondamment décrit dans le Nouveau Testament et souvent expliqué par le Christ lui-même. Et l’on voit saint Paul
parler du « dieu de ce monde », des « dieux », du prince de ce monde, du prince des ténèbres, etc… Le dualisme
cathare, supposé spécifique du Catharisme, est en fait intégralement contenu dans le Nouveau Testament et en
particulier dans les Évangiles. Et cela est intégralement relaté dans les écritures cathares. Et là encore : comprenons
l’Esprit des Écritures et ne nous arrêtons pas à la lettre.
C’EST POURQUOI NOUS DISONS EN CONCLUSION, QUE LES CATHARES SONT MONOTHÉISTES ET DUALISTES !
Δ MYTHOLOGIE CATHARE. Toute mythologie est une hypothèse, prenant la forme d’une légende, qui, d’une part,
ne peut pas être prouvée, et qui, d’autre part, ne peut pas être étayée par des témoignages, des données et des
documents concrets, palpables, directs et irréfutables. Une mythologie est une évocation merveilleuse de quelque
chose qui a peut-être existé ou encore le récit non moins merveilleux de quelque chose qui n’a jamais existé ! Mais
c’est aussi une hypothèse fondée sur les connaissances d’une époque, sur des intuitions ou sur des souvenirs
déformés, ou sur des sciences perdues ou simplement oubliées, ou encore sur des réalités dont les preuves ont
disparu. Une mythologie peut, en effet, être l’ultime reflet de l’histoire, réelle mais perdue, d’un monde, lui aussi
perdu, de civilisations englouties comme la légendaire Atlantide décrite par Platon. Que sait-on par exemple des
civilisations qui existèrent éventuellement avant le grand déluge et dont les scientifiques du XXIe siècle ont fini par
établir les preuves et par reconstituer le scénario ? Objectivement, outre l’odyssée de Noé racontée dans le
Deutéronome, il nous reste l’épopée de Gilgamesh, témoignage plus ancien rapporté dans les écrits sumériens
cunéiformes, antérieurs au Deutéronome, traitant des conflits entre des populations se préparant au grand désastre
d’un déluge annoncé et inéluctable et mettant des écrits à l’abri ! Ainsi, d’après ce récit plusieurs fois millénaire,
matériellement existant et lisible, il y avait bien, avant le déluge, prouvé par les géologues, des écrits et donc une
civilisation capable de produire et d’utiliser une écriture. Aussi pouvons-nous conclure aujourd’hui que la mythologie
du déluge est bien la trace d’une histoire réelle que les progrès de la science permettent de décrypter et de cerner
de mieux en mieux. Nous pouvons alors espérer qu’il en sera progressivement de même des futures relations des
genèses du Monde, de l’Univers et des Hommes. Ainsi en sera-t-il des définitions de Dieu. Ainsi en sera-t-il de nos
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mythologies et de nos théories sur l’origine, la nature et l’exercice du mal. Mais pour l’instant nous en sommes
toujours réduits non pas aux certitudes, mais aux hypothèses mythologiques. Car la mythologie peut aussi être une
vue de notre esprit, ou simplement le reflet naïf ou romantique de ce que nous aimerions bien que telle ou telle
chose soit ou ne soit pas. Aussi choisissons-nous d’être prudents et de ne pas classer nos mythologies préférées
parmi nos certitudes tout autant préférées. Tout au plus pouvons-nous garder l’espoir qu’un jour la science des
Hommes viendra prouver et décrire ce qui jusqu’alors était soit un mystère inexplicable, innommable et
indéfinissable, soit une merveilleuse hypothèse.
Δ INTERROGATIO JOHANNIS : LA CÈNE SECRÈTE OU LIVRE SECRET DES CATHARES. L’écrit cathare, la Cène
secrète, fidèle à l’héritage origénien, relate que : « Lucifer, jaloux de Dieu, monta en cachette au Ciel de Dieu, où, par
des propos trompeurs, il abusa les âmes de ce Ciel, les entraînant sur terre et dans l’air nébuleux. Enhardi il remonta
au Ciel avec ses complices. Là, il livra combat à Michel, l’archange qui le vainquit et le précipita « en bas » :« Une
grande bataille fut livrée dans le Ciel. Michel et ses anges luttaient contre le dragon, et le dragon luttait avec l’aide
de ses anges à lui. (Lucifer) fut précipité du Ciel par Michel. Mais (Lucifer) enferma les âmes entraînées en bas dans
les corps de chair comme dans des prisons et il continue à les y enfermer quotidiennement. Ces âmes sont le tiers
des étoiles du Ciel entraînées par le dragon. Elles ont été précipitées en ce monde par Dieu, en raison de leur péché,
quand elles ont consenti à (Lucifer) dans le Ciel... Mon Père donna un ordre et (Lucifer) fut transformé, en raison de
son orgueil : on retira la Lumière de sa gloire, et son visage devint d'abord semblable au fer rouge puis prit l'aspect
de celui d’un Homme (Interrogatio Johannis ; Apocalypse 12, 4).
LES GRANDES HYPOTHÈSES DUALISTES SONT TOUT D’ABORD DES MYTHOLOGIES. Comme toute mythologie, elles
sont invérifiables et improuvables, CAR IL N’Y A PAS D’EXPÉRIMENTATION POSSIBLE. C’est là qu’apparaît la Foi :
nous croyons que c’est vrai. Puis apparaît l’espérance : nous espérons que c’est vrai. Nous sommes là dans les
premières phases de toute religion. Saint Paul distingue trois phases : la Foi, l’Espérance et l’Amour. Et sa conclusion
est que « la plus grande des trois », la finalité attendue, c’est l’Amour, c’est-à dire la troisième et dernière phase. Les
rôles respectifs attribués aux deux principes du dualisme chrétien, et donc cathares, n’en restent pas moins des
hypothèses, des mythologies qui, comme toute mythologie, sont des hypothèses invérifiables.
MAIS LA TROISIÈME PHASE, CELLE DE L’AMOUR, EST CELLE QUI PEUT S’EXPÉRIMENTER. En effet, les Cathares se
sont engagés dans un Chemin, celui qui a été tracé par le Christ, qui va conduire tout « Pérégrinateur » à
expérimenter et à vérifier par lui-même et donc à croire non par la foi mais par la certitude de cette véritable et
objective prise de conscience que l’Évangile appelle « Épignôsis », la Connaissance suprême.
Le supposé dualisme spécifique cathare a été jusqu’à maintenant en fait L’ARBRE QUI CACHE LA FORÊT de LA
FACETTE PRINCIPALE DU CATHARISME QU’EST LA QUÊTE MYSTIQUE offerte à tout Être humain qui s’engage sur le
Chemin qui conduit à sa réintégration en Dieu. Et nous allons voir que CETTE DIMENSION MYSTIQUE EST EN FAIT
LA CARACTÉRISTIQUE MAJEURE DU CHRISTIANISME CATHARE.
t L’ESPRIT PRIME SUR LA LETTRE : « LA LETTRE TUE, L’ESPRIT DONNE LA VIE »
Δ À LA RECHERCHE PERMANENTE DU « SENS PROFOND ET DE LA VRAIE DIGNITÉ » DES ÉCRITURES. En
1022, des Chrétiens de toute évidence cathares, que les historiens ont coutume d’appeler « Les Chanoines
d’Orléans », s’adressaient ainsi à l’un de leurs disciples novice : « Tu as commencé à ouvrir les yeux d’un esprit sain
à la lumière de la vraie foi. NOUS T’OUVRIRONS LA PORTE DU SALUT. Tu y entreras par l’imposition de nos mains
et tu seras lavé de tout péché. Tu seras empli du don du Saint-Esprit qui t’enseignera sans réserve LE SENS
PROFOND ET LA VRAIE DIGNITÉ DE TOUTES LES ÉCRITURES. Rassasié de la nourriture divine, fortifié et comblé
dans ton Homme intérieur, tu verras souvent avec nous des visions angéliques. Muni de la Consolation, tu pourras
aller sans délai ni difficulté où tu voudras. Rien ne te manquera, car le Dieu de toute richesse, en qui reposent les
trésors de la Sagesse et de la science, ne manquera jamais de t’accompagner en toutes choses. »
Nous prenons pied maintenant dans cette autre dimension qui montre que la suite de la Quête se déroule
simultanément à notre existence terrestre, dans l’autre monde : « Vos yeux de chair ne peuvent pas voir
l’avènement du Royaume de Dieu. Aussi ne dites pas : regardez, le Royaume est ici ou, regardez, il est là. Car, en
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vérité, le Royaume de Dieu est en vous-mêmes ». « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie ; nul ne va au Père que par
moi ». (Évangiles de Luc 4, 43 ; 8, 1 ; 17, 20-21 ; Jean 14,6). Johan Tauler, mystique rhénan, décrit ainsi, au XIVe
siècle, « le moment où la Porte s’ouvre et où l’Homme franchit le Seuil » : « le Seigneur enlève le voile qui couvrait
les yeux de l'Homme sur la Voie et il lui découvre la vérité ». Pour le futur Parfait l’heure est venue de la sortie de
son amnésie dans la « terre d’oubli » : c’est « le Mariage mystique » au cours duquel l’âme incarnée reprend
conscience et mémoire de l’existence de son âme soeur, son Esprit qui, depuis le Commencement, issu de la syzygie
originelle, assure, dans l’autre monde, « l’interface » entre le monde divin et immatériel de l’Esprit et le « monde du
mélange » où s’entrechoquent et cohabitent le mal et le bien ainsi que le physique et le psychique. D’autres
traditions appellent ce moment « l’éveil ». Mais, au-delà des mots, c’est à ce moment-là que le « Pérégrinateur » sait
objectivement qu’il est désormais un Parfait et qu’au-delà de sa foi et de son espérance antérieures il est désormais
en train d’expérimenter et de vivre sa nouvelle réalité.
t L’ÉGLISE DE DIEU N’EST PAS ET NE DOIT PAS ÊTRE NI DEVENIR
UNE INSTITUTION FORMELLE ET TEMPORELLE
Δ L’ÉGLISE N’EST PAS FAITE DE MAIN D’HOMME. « Dans la Jérusalem d’en haut se trouvent les Esprits
auxquels les âmes ayant vécu dans les bonnes oeuvres doivent être attachées après avoir été, tout comme ces
Esprits, édifiées par Dieu. » (Manuscrit cathare occitan de Dublin). Dans la pédagogie cathare, cette citation décrit
« le Mariage mystique (Oc : espiritual) pendant lequel l’âme qui était prisonnière de la chair rejoint son Esprit qui
était resté au Ciel » : « vous êtes ici, temporellement, devant l’Église de Dieu, au milieu des disciples de Jésus Christ,
où le Père, le Fils et le Saint Esprit habitent spirituellement. L’Église de Dieu n’est pas un édifice matériel – fait de
quelque matière terrestre – mais elle est l’Assemblée des Chrétiens où résident le Père, le Fils et le Saint Esprit.
(Manuscrit cathare latin de Florence).
Δ L’ÉGLISE DE DIEU EST UN TEMPLE PUREMENT SPIRITUEL : « Chacun de nous est Temple de Dieu vivant et
l’Esprit de Dieu habite en nous. Nous sommes Temple du Saint-Esprit qui est en nous et que nous tenons de Dieu. Il
n’est besoin ni de synagogues ni de temples pour communiquer avec Dieu car l’Église de Dieu n’est faite ni de
pierre, ni de bois, ni de toutes autres choses faites de main d’Homme car Dieu qui a fait le monde et tout ce qui s'y
trouve, étant le Seigneur du Ciel et de la terre, ne réside pas dans des maisons faites de main d’Homme (mais en
chacun de nous). » (Manuscrit de Dublin, Actes des Apôtres)
Et c’est cela le fond du catharisme ! Il n’est nul besoin d’institutions hiérarchisées, ni de structures matérielles, ni de
problématiques et contestables filiations humaines pour suivre le Chemin tracé par le Christ dans l’Évangile. Cet
entendement tout spirituel de l’Évangile – l’Entendement du Bien – souligne la dérision de la prétention de quelque
institution que ce soit à s’auto attribuer les pouvoirs divins. Car il faut craindre qu’alors naissent les affirmations
dogmatiques qui matérialisent les institutions théocratiques qui génèrent de nouveaux fantasmes et de nouvelles
hypothèses qu’elles n’hésitent pas à dénommer « Vérité ». La création par l’Homme d’institutions religieuses
temporelles conduit obligatoirement à la prédominance de la soif de gloires personnelles, de pouvoirs et de biens
terrestres et à l’hypertrophie des égos anesthésiant tout respect de l’humanité, toutes choses qui ne peuvent être
entretenues durablement que par l’instauration de règles matérielles coercitives nécessitant un arsenal théologique
dogmatique. C’est ainsi que les cathares ont pu expérimenter à leurs dépens que « l’église de Rome est celle qui
possède et qui écorche » et que s’ensuivent anathèmes, excommunications, inquisitions, meurtres rituels et guerres
soi-disant saintes qui sont les fruits inévitables de toutes les dogmatiques qu’elles soient religieuses ou politiques.
C’est ainsi que naissent les fondamentalismes et les intégrismes. Ainsi, depuis la nuit des temps, échouent la plupart
des religions et des idéologies devenues sources de contraintes et de violences.
LE JOUR DU CHOIX CRUCIAL. Tout être humain, comme aussi toute organisation humaine, est inévitablement
confronté, un jour ou l’autre, à un choix crucial. Un jour se présente un carrefour d’où partent deux nouvelles
voies. La première, la plus évidente, la plus facile mais la plus lourde de conséquences néfastes, est celle que
Matthieu décrit dans l’Évangile (4, 8-10) : « Le diable transporte Jésus sur une fort haute montagne et lui montre
tous les royaumes du monde et leur gloire, et il lui dit : « Je te donnerai toutes ces choses si, te prosternant, tu me
rends hommage. » Et Jésus lui répond en lui montrant la deuxième voie : « Tu rendras hommage au Seigneur ton
Dieu et tu le serviras seul. » Et plus tard il rappelle que « Le Royaume de Dieu n’est pas de ce monde et qu’il faut
rendre à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu » (Marc 12, 14-17). L’incroyable est que la « grande
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église » a choisi la première voie. Elle a choisi la voie qui l’a conduite vers la quête des pouvoirs temporels sur tous
les royaumes et pouvoirs du monde et vers leurs gloires, se prosternant devant le « Prince de ce monde » et lui
rendant hommage, tout en sachant pertinemment que le « Royaume du Père n’est pas de ce monde. » La plupart
des autres églises, qualifiées, au cours des vingt siècles écoulés, de « dissidentes » ou d’« hérétiques », se sont, elles
aussi, engouffrées dans la même impasse, s’aventurant délibérément dans la conquête de la domination matérialiste
de « tous les royaumes du monde et de leur gloire », rendant hommage non pas au Christ, non pas à Dieu l’Unique,
mais aux « Princes de ce monde » que les Psaumes définissent ainsi : « Les dieux des nations sont des démons
(Psaumes 96, 5). » Elles se sont résolument engagées dans cette voie de toutes les violences où elles ont fourvoyé le
Christianisme. Elles y ont découvert les puissances et les béatitudes terrestres qu’offrent le pouvoir et les richesses.
Et pour maintenir leur emprise sur les Hommes, elles n’ont pas hésité à enfreindre tous les commandements du
Christ, ignorant en particulier sa mise en garde : « Remets ton épée à sa place, car tous ceux qui prennent l'épée
périront par l'épée (Matthieu 26,52). » « Errare humanum est, perseverare diabolicum ; se tromper est le propre de
l’Homme, mais persévérer est le propre du diable ».
ET CE CHOIX EST CLAIR : IL Y A DEUX VOIES. La première voie est celle du pouvoir temporel où l’on rend hommage
au Principe du mal devant lequel on se prosterne ; c’est la voie des orgueils ; c’est la voie de la haine ; c’est la voie
des affrontements perpétuels ; c’est la voie où l’humanité qui a vécu par la violence périra par la violence ; c’est la
voie qui entraîne l’humanité à sa perte ; c’est la voie que nous devons impérativement abandonner. La deuxième
voie est la Voie de l’Amour ; elle est celle où, selon le Christ, nous rendons hommage à Dieu que nous servons, Lui
seul. C’est cette autre voie qui est le Chemin du Christ, la Voie de l’Amour, celle de la Bonne Parole et de la Paix sur
terre offerte par le Christ aux Hommes de bonne volonté. Ainsi les « églises » et tous les croyants rejoindront «
l’Église de Dieu » reformant ainsi l’immatérielle « Tunique sans couture » que le Christ nous demande de tisser avec
lui. C’est à cette grande réconciliation et à cette permanente communion oecuménique de toutes les églises qu’il
nous faut désormais tendre.
RELIGION ET SPIRITUALITÉ D’UN CÔTÉ ET POUVOIR TEMPOREL, MÊME MODESTE, DE L’AUTRE, SONT
ANTAGONISTES : d’où le refus de toute Théocratie et refus de toute ingérence du temporel dans le spirituel comme
du spirituel dans le temporel. Temporel et Spirituel doivent être soigneusement séparés. D’où à grande comme à
petite échelle, une laïcité absolue fonctionnant logiquement dans les deux sens.
t DES PRATIQUES ASCÉTIQUES ET DES RITUELS SIMPLES ET CHARISMATIQUES :
BAPTÊME D’ESPRIT, EUCHARISTIE, HÉSYCHASME
Δ LE BAPTÊME DU CHRIST : LE BAPTÊME D’ESPRIT, LA CONSOLATION (CONSOLAMENTUM). Il est le
Baptême que l’on fait, sans eau, avec l’imposition du Livre des Évangiles sur la poitrine et avec l’imposition des
mains. Ce Baptême procure à n’importe qui la rémission des péchés et le rend aussi saint que saint Pierre. Ils
condamnent le baptême d’eau disant que c’est celui de Jean, le Baptiste, dans lequel nul ne peut être sauvé. Ils
condamnent le baptême des enfants disant qu’avant l’âge de discrétion nul ne peut être sauvé (Registre d’Inquisition
de Juan de Torquemada).
« CETTE ÉGLISE PRATIQUE LE BAPTÊME SPIRITUEL, c’est-à-dire l’imposition des mains, par lequel est donné le Saint-
Esprit. Jean, le Baptiste, dit : « Celui qui doit venir après moi (le Christ), celui-là vous baptisera dans le Saint-Esprit. »
Quand Notre Seigneur Jésus-Christ fut venu du siège de la grandeur pour sauver son peuple, il enseigna à sa sainte
Église qu’elle baptise les autres de ce Baptême, comme il le dit dans l’Évangile : « Allez et enseignez toutes les
nations et baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. » Et dans l’Évangile de saint Marc, il leur dit :
« Allez dans le monde entier, prêchez l’Évangile à toutes les créatures et celui qui croira et sera baptisé sera sauvé et
celui qui ne croira pas sera condamné. » Mais l’église romaine dit que le Christ entendait par là le baptême de l’eau
matérielle que pratiquait Jean-Baptiste avant que le Christ ne prêche. Ce que l’on peut réfuter par de multiples
raisons. Car si le baptême d’eau pratiqué par l’église romaine était celui par lequel les gens pouvaient être sauvés,
alors le Christ serait venu pour rien, car avant lui, on avait déjà le baptême d’eau. L’Église du Christ baptise d’un
autre Baptême que celui de Jean-Baptiste qui disait lui-même : « Je vous baptise dans l’eau, mais le Christ vous
baptisera dans le Saint-Esprit. » Jean était venu baptiser dans la seule eau, pour inviter les gens à croire dans le
Baptême du Christ, et c’est pour cela qu’il porta un ferme témoignage du Christ dont il annonçait la venue.
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t MÉTEMPSYCOSE ET TRADUCIANISME : RENAISSANCES ET VIES SUCCESSIVES
Δ JEAN DE LUGIO, SCHOLASTICIEN CATHARE : « Les âmes de Dieu passent de corps en corps et, finalement,
toutes seront libérées de la peine et de la faute ». (Le Livre des deux principes)
Δ JACQUES AUTHIÉ, PARFAIT CATHARE : « Enfermées par le mauvais créateur dans les tuniques de la terre
d’oubli, les âmes déchues ne pouvaient que se réincarner mécaniquement de tunique en tunique, vieillir jusqu’à ce
que soit venu, « de la part du Père, Celui qui leur rendit la mémoire, et, par la bouche du Saint Esprit, celui qui nous
montra la Voie du Salut ». (Registre d’Inquisition de Jacques Fournier)
Δ MONÉTA DE CRÉMONE, INQUISITEUR DOMINICAIN : L’âme se transmet à partir de l’âme, comme la chair à
partir de la chair. Cette transmission s’opère à partir d’un germe angélique, c’est-à-dire depuis l’Âme d’Adam, qui fut
céleste, qui descendit dans ce monde et qui fut incluse dans un corps terrestre. (La notice liminaire. Vers 1240)
Δ GUILHEM BÉLIBASTE, PARFAIT CATHARE : « Le monde ne finira que lorsque tous les esprits créés par le Père
Saint auront été incorporés dans les corps d’hommes et de femmes d’une foi pure dans lesquels ils seront sauvés ;
après quoi ils retourneront au Père céleste... Tout Être humain imparfait renaît dans d’autres corps. Quant à celui
qui, au cours de son ultime incarnation, reçoit l’Esprit-Saint et devient à son tour Parfait, il ne meurt pas. Il est
transféré comme dans un sommeil. Il quitte cette tunique de chair et de terre sans peine et revêt la Tunique
immortelle et divine du Christ. Devenu semblable à Lui de corps et de forme, il est admis dans le Royaume du Père,
précédé par les Anges et les Apôtres. Le corps de chair et de terre qu’il a quitté retourne à la cendre et à la
poussière, sans jamais ressusciter. Nos esprits s’en vont de tunique en tunique jusqu’à ce qu’ils entrent dans une
Belle tunique, c’est-à-dire dans le corps d’un homme ou d’une femme qui a l’Entendement du Bien. Là ils sont dans
la Justice et dans la Vérité. Parvenus dans ce dernier corps, nos esprits seront sauvés et après être sortis de cette
Belle tunique, ils retourneront au Père Saint. Le monde ne finira que lorsque tous les esprits créés par le Père Saint
auront été incorporés dans les corps d’hommes et de femmes d’une foi pure dans lesquels ils seront sauvés. C’est
alors qu’ils retourneront au Père céleste, dans le Royaume de Dieu » (Registre d’inquisition de Jacques Fournier).
Δ ÉVANGILE SELON SAINT JEAN. Les Cathares nomment le processus de réincarnation renaître à nouveau. Une
référence évangélique nous est donnée dans l’Évangile de Jean qui cite la Parole suivante du Christ : « Amen, Amen,
je te le dis, à moins de naître à nouveau, nul ne peut voir le Royaume de Dieu » (Jean 3, 3).
Δ ANNE BRENON, HISTORIENNE DU CATHARISME : Il s’agit bien d’une part d’un mécanisme à la fois
individualisé et collectif de progression au fil de vies successives, processus accompagné de rétributions positives ou
négatives autorisées par le processus de métempsycose ; et d’autre part d’un processus où « il y a encore
individualité, où il y a des corps de gloire (des trônes, des couronnes, des tuniques). Il ne s’agit pas d’un “magma
confus et indistinct de la présence divine dans laquelle on se fond”.
t L’ASCÈSE : PRIÈRE, JEÛNE, VÉGÉTARISME ET CONTINENCE DES PARFAITS.
« Comme les Vrais Chrétiens sont membres du Christ, il convient que, comme leur chef Jésus-Christ, ils soient
Saints, Purs, chastes et ne soient souillés d’aucun péché. Toute personne qui prétend demeurer dans le Christ doit
se conduire comme lui-même se conduisit ». (Manuscrit de Dublin)
Δ LA PRIÈRE
LE PATER. Le Notre Père, aussi appelé Oraison dominicale, est récité en langue vernaculaire. Pour les Cathares, il est
« la Prière » dictée aux Hommes par le Verbe de Dieu. Dans leurs exégèses les Cathares démontrent que chaque mot
du Pater a sa signification spirituelle et son importance éthique et métaphysique. Toute la signification de la Bible
est rassemblée dans le Pater. La version occitane est extraite du Manuscrit cathare de Lyon qui contient un Nouveau
Testament et un Rituel cathare. Le Rituel cathare de Lyon contient aussi un Pater et un Prologue de l’Évangile de
Jean en latin. Des textes latins il ressort qu’il s’agit d’une version très proche de celle du texte classique et canonique
romain de la Vulgate, oeuvre de Jérôme (en 405). Mais un examen attentif révèle plusieurs « corrections » de la
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Vulgate opérées à partir de textes grecs originels ce qui confirme la parfaite connaissance qu’ont les Cathares des
écritures originelles en grec.
Notre Père qui es aux Cieux
Que Ton Nom soit sanctifié,
Que Ton Royaume advienne,
Que Ta Volonté soit faite sur la Terre comme au Ciel.
Donne-nous aujourd’hui notre Pain supersubstantiel.
Efface nos dettes comme nous effaçons celles de nos débiteurs.
Ne nous soumets pas à la tentation.
Mais délivre-nous du mal.
Car à toi sont le Royaume,
la Puissance et la Gloire,
Amen.
L’HÉSYCHASME. La technique de prière des chrétiens cathares est la même que celle des chrétiens orthodoxes grecs.
Il s’agit d’un hésychasme, d’une litanie. Le mot grec hésychia signifie tranquillité, paix, Silence. La vocation de tout
hésychasme est d’être une pratique mystique d’accès au spirituel. C’est exactement cette technique mystique que
pratiquent toujours aujourd’hui les moines orthodoxes grecs, par exemple au mont Athos. Le pape Jean-Paul II
parlait lui aussi de la prière du Coeur qui consiste à savoir écouter la Voix de l'Esprit dans un Silence profond et
réceptif, comme une respiration de l'âme. L'hésychasme, selon le dictionnaire Larousse, est une école de spiritualité
fondée sur la contemplation et l'invocation réitérée du nom du Christ. Ceux qui adhèrent à cette spiritualité sont des
hésychastes. Cette spiritualité est née parmi les Pères du désert au IVe siècle et s'est développée spécialement dans
l'Église grecque. Mais celui qui promut solidement l’hésychasme fut Grégoire Palamas (1296-1359), d'abord moine
au Mont Athos, puis archevêque de Thessalonique en 1347. Notons que cette époque de l’adoption progressive de
l’hésychasme par les moines orthodoxes grecs coïncide exactement avec celle des persécutions finales que subirent
les derniers Parfaits cathares occitans : Pierre, Guilhem et Jacques Authié, Prades Tavernier, Philippe d’Alayrac et
Guilhem Bélibaste. Il y a aussi des témoignages de l’arrivée au mont Athos, à la même époque, de fugitifs cathares
en provenance de Thessalonique. Mais notons aussi que l’hésychasme cathare était toujours pratiqué en Bosnie,
dans les années 1450, comme en témoigne le Rituel bogomile de Radoslav le Chrétien. L’évidence est que la prière
pratiquée par les Parfaits cathares est véritablement un hésychasme. Les différents courants spirituels du
christianisme ont pratiqué ou pratiquent toujours l’hésychasme, qu’ils le nomment ainsi ou autrement. Il s’agit pour
celui qui le pratique d’accéder par l’hésychasme, par la prière, par la méditation, au SILENCE, à la Paix profonde, à la
Contemplation de la présence divine, à l’Éveil, à la Plénitude de la Connaissance, à la Perfection, autrement dit à la
pleine conscience et à l’expérimentation du Sens profond et de la Vraie dignité de toutes les Écritures qui
conduisent le Pérégrinateur aux visions angéliques dont parlent nos amis les « Chanoines d’Orléans ».
Dans tous les cas, il y a invocation d’un Principe divin :
Hésychasme des apôtres Maranatha
Hésychasme cathare La Trinité divine
Hésychasme orthodoxe grec Le Nom du Christ
Rosaire catholique Marie Mère de Dieu
En fait, tous les hésychasmes, sauf le rosaire catholique, imaginé par Dominique de Guzman, invoquent le Nom du
Christ. L’hésychasme orthodoxe est « Kyrie eleison, Christe eleison, Seigneur, Christ, prend pitié » ; l’hésychasme
cathare est soit « Adoremus Patrem et Filium et Spiritum Sanctum soit Gratia Domini Nostri Jesus Christi sit cum
omnibus nobis. » Notons, dans la Didaché et dans le Nouveau Testament, l’hésychasme pratiqué par les apôtres :
« Maranatha, Viens Seigneur ! » Presque tous les hésychasmes ont en commun le terme de « Seigneur ». En fait,
Maranatha, Kyrie eleison et Domini Nostri Jesus Christi sont quasiment synonymes !
LE SILENCE DE LA HAUTE-MONTAGNE. L’étape majeure de toute prière et de toute médiation est d’ouvrir la Porte
qui s’ouvre sur le Silence et de demeurer dans cet état de Silence. Dans l’Évangile ce Silence est parfois
symboliquement appelé Haute-Montagne. En mystique, la Haute-Montagne est le lieu immatériel atteint par le
méditant lorsqu’il parvient au Silence, à l’Éveil et à la Communion avec le Divin. « Descendre de la Montagne »,
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c’est sortir des visions de la méditation. Les trois apôtres présents auprès du Christ lors de la scène de la
Transfiguration ont en fait atteint à ce moment-là l’Éveil. C’est en ce sens qu’ils sont sur la Haute-Montagne, en
compagnie du Christ, de Moïse, d’Élie et de la Voix du Père. La violente frayeur qu’ils éprouvent à ce moment-là les
fait sortir du Silence de l’Éveil : « ils descendent de la Montagne » ! Le Christ transfiguré, c’est une vision. Le Christ
transfiguré en compagnie des deux grands prophètes du passé, Moïse et Élie, c’est une vision. Cette vision est
accompagnée de la Voix, du Verbe, de la Parole de Dieu. Pour Pierre, Jacques et Jean, désormais cette vision qui les a
effrayés aura ancré en eux la certitude de la réalité du Christ : un être divin, Fils, donc Émanation de Dieu, porteur du
Verbe, resplendissant comme le Soleil et blanc comme la Lumière, conversant avec les prophètes disparus et avec le
Père divin et qui leur parle de la prochaine résurrection du Fils de l’Homme.
Il s’agit d’IMPOSER LE SILENCE À NOTRE MENTAL, C'EST-À-DIRE À NOTRE ÉGO. Parvenir à nous immerger dans le
Silence nous rend prêts à entendre la Voix qui est en nous et qui était jusque-là brouillée par le vacarme parasite de
notre mental. Le fait de connaître et de répéter par coeur le texte du Pater ou encore l’hésychasme cathare (ou tout
autre) nous conduit à mettre en oeuvre notre mémoire. Or la mémoire est à l’opposé de l’oubli (tardemah, lêthê) :
elle est aletheia : elle est une vérité ! La prière hésychaste fait appel à la mémoire, par la répétition permanente d’un
texte codifié et mémorisé qui entraîne notre âme loin des tumultes du brouillage de notre intellect : la mémorisation
produit une visualisation qui impose le Silence à notre mental qui est notre Coeur psychique. Notre prière est, à ce
moment-là, respiration (Souffle, Esprit, Pneuma) : inspiration, expiration, inspir, expir, rythmant notre invocation ! Et
finalement c’est dans le Silence, dans notre secret, en notre Esprit et en Conscience, qu’en notre Temple, s’établit le
dialogue avec notre Paraklétos, notre maître intérieur, avec le Père, le Fils et le Saint-Esprit.
« ÉPIGNÔSIS », LA PLÉNITUDE DE LA CONNAISSANCE L’une des tâches de l’Être humain sur terre est de découvrir
son Moi intérieur, son Individualité, le Soi, c’est-à-dire la Divinité de son âme – c’est-à-dire, dans la terminologie
cathare, son Esprit. La prière est l’une des portes de cette découverte. C’est par elle que survient l’Épignôsis, la
Plénitude de la Connaissance. C’est par elle que se produit la communion intérieure absolue – le Mariage mystique
des cathares – les retrouvailles de l’égo et du Soi, le contact avec le Soi, avec notre Esprit et de là avec l’Esprit
paraclet mis à notre disposition par le Christ. Alors advient, en pleine conscience, le Temple du Dieu vivant que nous
sommes tous. Par l’hésychasme, il finit par ne plus percevoir ni le brouillage mental de l’intellect, ni tout ce qui lui est
extérieur. Il entre alors en lui-même en ce Temple où converge l’essence de toutes les données spirituelles,
psychiques et matérielles qui constituent notre existence. Alors il voit, il entend, il ressent jusqu’à ce que le mental
se manifeste à nouveau. Remarquer soudain, en sursaut, en cette circonstance que le mental poursuit en fait son
oeuvre prouve qu’avant ce soudain nous étions ailleurs, précisément dans le Silence du Seigneur, dans le Silence de
l’âme. En fait nous venons juste de « redescendre de la Haute Montagne ! »
SOUDAIN ! Le Silence est rompu au moment du... soudain ! Tout comme lorsque nous tressaillons pendant une
somnolence, nous nous rendons compte soudain, tout à coup, que nous étions jusqu’alors profondément ailleurs –
sur la « Haute Montagne » – et que l’intellect – le mental – vient tout juste de reprendre le dessus et qu’il est
toujours en train de travailler, car il n’a jamais cessé de le faire, bien qu’au moment du Silence notre conscience n’en
ait plus eu la perception. Entrer dans le Silence, c’est effectivement ne plus avoir objectivement conscience des
processus mentaux et physiques dont l’activité est ininterrompue tout au long de l’existence humaine. Il faut
comprendre qu’à l’instant même où nous prenons conscience de ces processus, la période de Silence est achevée,
mais qu’avant nous étions bien dans le Silence.
L’HÉSYCHASME CATHARE. « Que notre Prière s’élève vers le Père Saint comme une fumée d’encens », comme le dit
David, le Psalmiste : « Ô Seigneur, que ma prière, telle la nuée de l’encens, s’élève vers Toi » (Manuscrit cathare de
Dublin). L’hésychasme pratiqué par les cathares débute significativement par l’invocation : « Adoremus Patrem et
Filium et Spriritum Sanctum : prions le Père, le Fils et le Saint-Esprit ! » Il est utile de souligner que les cathares,
grands défenseurs de la lecture et de la transcription des Écritures en langues vernaculaires, pratiquent pourtant
deux litanies en latin :
(i) Adoremus Patrem et Filium et Spiritum Sanctum.
(ii) Gratia Domini Nostri Jesu Christi sit cum omnibus nobis.
Δ LE JEÛNE. Jeûner fait partie des pratiques ascétiques classiques qui favorisent la qualité, l’efficacité et la finalité
de la méditation et de la prière. Jeûner contribue à minimiser l’emprise des instincts corporels et de l’intellect (le
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« coeur ») et à conduire les Parfaits vers l’Éveil de leur esprit. Tout comme aujourd’hui les Chrétiens coptes, les
Parfaits observent trois carêmes par an, c'est-à-dire au total 120 jours de jeûne, au pain et à l’eau. Mais ils jeûnent
aussi chaque fois qu’ils ne travaillent pas, qu’ils ne prêchent pas, qu’ils ne prient pas. Enfin ils jeûnent parfois de
manière beaucoup plus sévère soit par pénitence après avoir manqué gravement aux règles éthiques des Parfaits,
soit pour se préparer à affronter une épreuve difficile, comme la torture ou l’approche d’une mort violente : c’est
cela l’ « endura ». Au total, ils jeûnent plus de 200 jours par an.
Δ LA PRÉSENCE RÉELLE DU CHRIST.
L’EUCHARISTIE. Il n’est pas exact de dire que les cathares ne pratiquent pas l’Eucharistie. Ils pratiquent, en
l’appelant Bénédiction du Pain, l’Eucharistie, exactement telle qu’elle est décrite dans les Évangiles. Quant aux
catholiques, ils pratiquent, sous l’appellation de transsubstantiation, une Eucharistie singulièrement modifiée,
prélude de l’institution de la messe, telle qu’elle est décrite dans le dogme de « la présence réelle » institué par le
pape Innocent III lors du concile de Latran IV en 1215, en pleine Croisade contre les Albigeois. Les cathares
pratiquent véritablement l’Eucharistie, dans sa simplicité évangélique, et récusent la transsubstantiation et la
messe catholiques. Pour les catholiques l’Eucharistie est l’expérience mystique sublime dont la clé de voute est le
dogme de la transsubstantiation, c’est-à-dire la présence réelle du Corps du Christ dans l’hostie consacrée ; c’est-àdire
une interprétation à la lettre, et non à l’esprit, des paraboles du Christ.
La plupart des historiens ont fini par confondre Eucharistie et Transsubstantiation. Ce qui est faux. Que les
catholiques considèrent que la Transsubstantiation c’est cela l’Eucharistie est une façon de voir les choses. Pour les
Cathares leur partage du Pain Bénit c’est cela l’Eucharistie ; et il faut reconnaître que leur définition de l’Eucharistie
est conforme à la relation qui en est faite dans l’Évangile. Pour les Cathares, l’Eucharistie c’est d’abord, comme le
demande l’Évangile :
(1) (Eucharisteo) rendre grâces à Dieu et
(2) (anamnesis) rendre au Christ l’hommage qu’il a demandé à ses disciples lors de la Cène : « Faites ceci en
mémoire de moi ». C’est ensuite
(3) (Eulogeo) s’imprégner du sens spirituel donné par le Christ au pain, en le bénissant et
(4) en le partageant entre eux. C’est aussi
(5) adhérer au sens spirituel donné par le Christ au vin, allégorie spirituelle de son sang, c’est-à-dire de son Esprit.
Enfin c’est
(6) être réceptif à l’enseignement de la Coupe, allégorie de l’Évangile. Le récit de la Passion est ici l’une des
paraboles qui conduisent à la découverte du sens spirituel de l’Eucharistie du Christ. Donc il est juste de dire que
les Cathares rejettent la Transsubstantiation et, par voie de conséquence, la Messe qui en découle. Et il est faux de
dire que les Cathares ne pratiquent pas l’Eucharistie ; et il est juste de dire qu’ils pratiquent véritablement
l’Eucharistie décrite dans l’Évangile et qu’ils nomment cérémonie du pain bénit. Enfin nous verrons ce que les
Chrétiens cathares définissent comme étant la présence réelle du Christ en chaque Chrétien.
Deux précisions importantes nous sont données par l’auteur du Manuscrit latin de Florence : « (1) Vous êtes
temporellement devant l’Église de Dieu où habitent spirituellement le Père, le Fils et le Saint-Esprit et (2) vous êtes,
en même temps, spirituellement présents, avec votre âme, devant Dieu le Père, devant le Christ et devant le Saint-
Esprit ». Adoremus Patrem et Filium et Spiritum Sanctum, disent inlassablement les Parfaits !
TELLE EST LA DÉFINITION CATHARE DE LA PRÉSENCE RÉELLE : Dieu, en sa Trinité, est réellement présent à tout
moment et il est perceptible à tout moment et à tout Homme, selon sa capacité spirituelle du moment. Pour les
catholiques, nous avons vu que le « Corps du Christ » ne devient réellement présent dans l’hostie que lors de
l’Eucharistie-transsubstantiation. Les chrétiens cathares n’acceptent pas cet artefact, cette invention forgée douze
siècles après le Christ. Pour eux la présence réelle du Christ est effective, spirituelle et permanente, en particulier
chez les Parfaits qui, devant la société cathare, ont pris conscience en eux de la présence réelle de l’Esprit-Saint, lors
de leur Consolation (Consolamentum). Pour eux, ce n’est pas dans une hostie qu’il faut rechercher la présence réelle
du Christ mais, c’est tout simplement en nous-mêmes, que nous en soyons conscient ou non, en ce Temple de Dieu
vivant que nous sommes. C’est au cours du processus de purification et de recherche de la perfection que nous
atteignons la prise de conscience de la présence réelle du Christ en nous-même ; le Christ qui a toujours été là et qui
est totalement immatériel. Rappelons que le pain supersusbtantiel demandé à Dieu dans le Pater, n’est pas un pain
matériel : c’est le Pain de Dieu descendu du Ciel, c’est le Christ, c’est le Verbe, c’est la Parole de Dieu, c’est l’Amour.
Comprenons surtout que la présence réelle du Christ en nous est toute spirituelle.
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LA VÉRITABLE PRÉSENCE RÉELLE : EN SOI-MÊME. Il s’agit de la présence réelle de la Trinité divine et donc du Christ.
Relisons cette Parole du Christ : « Ne dites pas : voyez, le Royaume est ici ; ou, voilà, il est là. Car c’est en vousmêmes
qu’est le Royaume de Dieu ! » (Évangile selon saint Luc). Ainsi la Trinité divine habite spirituellement dans ce
Royaume qui est en chacun de nous ! Sa présence est réelle en nous. Pour les catholiques, de manière restrictive, le
corps du Christ devient réellement et physiquement présent, mais dans l’hostie, lors de l’Eucharistie transformée en
pratique mystique exclusive. C’est ce que l’église catholique appelle transsubstantiation. C’est autour de cette notion
de transsubstantiation que l’église de Rome a progressivement formé la messe, grande absente des Évangiles. Pour
les chrétiens cathares, ce n’est pas dans une hostie qu’il faut rechercher la présence réelle du Christ mais c’est tout
simplement en nous-mêmes, en ce Temple de Dieu vivant que nous sommes. C’est au cours du processus de
purification et de recherche de la perfection que nous atteignons la prise de conscience de la présence réelle du
Christ en nous-mêmes ; le Christ étant, bien sûr, totalement immatériel. Rappelons que le pain supersusbtantiel
invoqué dans le Pater, c’est l’Évangile du Christ, la Parole de Dieu, le Verbe, l’Amour et que la présence réelle du
Christ en nous est autant réelle que toute spirituelle.
À NOUS DE TROUVER LE CHEMIN ET D’OUVRIR LA PORTE. Nous pouvons déjà retenir que le Royaume de Dieu (qui
n’est pas de ce monde) est à la fois en nous et hors de nous, c’est-à-dire partout et à tout moment. Des
enseignements croisés de Jésus et de ses apôtres, il ressort que ce Royaume est déjà là (depuis la première
Pentecôte) et non dans un avenir hypothétique et très lointain. Le Christ, qui nous montre le Chemin après avoir
confié les Clés de ce Royaume à Pierre et à ses apôtres, nous y attend afin, nous dit-il, d’y boire à nouveau avec nous
le fruit nouveau de la vigne. Dans ce Royaume qui est en notre Coeur se trouve le Christ lui-même, que nous en
ayons conscience ou non. À nous de trouver le Chemin et d’ouvrir la Porte qui s’ouvrira sur Lui et d’acquérir cette
prise de conscience que les Évangiles originels nomment, en grec, Épignôsis (la Plénitude de la Connaissance). Le
Christ précise même qu’« il est avec nous tous les jours, jusqu’à l’achèvement des temps » : le Christ est en nous,
en permanence et pour toujours. Chacun d’entre nous est Temple de Dieu où vivent en permanence avec nous et
en nous Dieu le Père, le Fils et l’Esprit de Dieu : cette Trinité qui est Dieu. L’auteur cathare inconnu du Manuscrit de
Florence ajoute que c’est temporellement qu’avec notre corps physique nous nous tenons devant le Royaume de
Dieu que l’on peut nommer aussi… Église de Dieu, mais que, néanmoins, c’est spirituellement que le Père, le Fils et le
Saint-Esprit habitent en nous et que notre âme, en nous, accueille Dieu, le Christ et le Saint-Esprit.
Distinguons bien : (1) C’est temporellement que nous sommes DEVANT (mais pas DANS) le Royaume de Dieu qui
n’est pas de « ce monde » (ce qui signifie que notre corps physique, « corruptible », n’a pas accès au Royaume de
Dieu) ; (2) C’est spirituellement que la Trinité divine habite en nous, Temple du Dieu vivant et que là, nous sommes
DEVANT Dieu.
t PRENEZ ET MANGEZ, CECI EST MON CORPS ! PRENEZ ET BUVEZ, CECI EST MON SANG !
Voici deux phrases qui ont fait couler beaucoup d’encre, beaucoup de salive et, malheureusement, beaucoup de
sang ! Pour les Chrétiens cathares, c’est dans le Pater que l’on comprend le sens véritable de l’Eucharistie (le sens
profond et la vraie dignité de toutes les Écritures). Il s’agit de la phrase : « Donne-nous aujourd’hui notre pain
supersubstantiel ». Aujourd’hui la très grande majorité des Bibles affiche une autre phrase : « Donne-nous
aujourd’hui notre pain quotidien ». Pourquoi cette différence ? Revenons au texte grec d’origine. La phrase
originelle est : « Ton arton èmon ton épiousion dos èmin sèméron ». Artos, « le pain ». Épiousios, constitué du
préfixe épi, « au-dessus » et de ousos, « l’esprit », « l’essence », « la susbstance ». Une traduction réaliste en
Français pourrait être « supersubstantiel ». Le Parfait cathare qui a écrit le Manuscrit de Lyon en occitan a traduit
par « Lo pan qu’es subre totas causas », « le pain qui est au-dessus de toutes choses ». Dire qu’ousos signifierait en
réalité « quotidien » ce serait, vulgairement parlant, « pousser le bouchon un peu loin » ! Mais n’est-ce pas, surtout,
une façon voulue d’enlever toute signification à l’un des passages les plus importants de l’enseignement du Verbe ?
LE PAIN SUPERSUBSTANTIEL, MOTEUR DE L’ÉSOTÉRISME CHRÉTIEN. Les enseignements prodigués par les Parfaits
cathares suivent cette même logique en s’appuyant sur la constante qu’est le Nouveau Testament et sur
l’apprentissage et la compréhension du sens profond de la Parole du Christ. Le coeur de cet enseignement réside
dans l’utilisation constante et dans la compréhension de la Prière léguée aux Hommes par le Christ : le Pater. Aussi
est-il important d’avoir toujours à l’esprit que, les versions les plus anciennement connues du Pater ayant été
rédigées en grec et non pas en latin, en cas de doutes et d’incompréhensions, c’est aux textes grecs qu’il convient de
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se référer. C‘est ainsi qu’au coeur du Pater se trouve donc ce mot grec d’une importance primordiale : Épiousios,
normalement traduit, en latin, par supersubstantialem, puis, en français par supersubstantiel. Notons que la
traduction correcte (ici en Français) tant d’Épiousios que de supersubstantialem n’est en aucun cas « quotidien » !
Et pourtant « quotidien » est mystérieusement devenu la traduction « normalisée, la traduction nominale. » Or
Épiousios est certainement l’un des mots-clés les plus importants de l’Évangile. Dans toute la Bible, il n’est utilisé
qu’une seule fois : c’est ce que l’on appelle un « hapax ».Comprendre exactement l’enseignement spirituel tant du
Christ que des Parfaits, c’est précisément l’utilité de la requête contenue dans le Pater originel : « donne-nous
aujourd’hui notre pain supersubstantiel ». Le pain supersubstantiel c’est la compréhension et la nourriture
spirituelles contenues à la fois dans l’étape du jour, dans les étapes suivantes et dans l’aboutissement de tout
l’enseignement du Christ.
LE MANUSCRIT CATHARE DE DUBLIN en donne une signification encore plus mystique : « l’Amour est appelé Pain
supersubstantiel (Épiousion) car IL EST AU-DESSUS DE TOUTES LES AUTRES SUBSTANCES qui participent à l’Être
humain : les Visitations, l’Esprit, la Vie, l’Âme, le Coeur et le Corps. « Au-dessus de toutes les autres substances, audessus
de toutes choses, supersubstantiel » : autant de traductions qui restituent au texte du Pater sa véritable
signification spirituelle, c’est-à-dire le sens profond et la vraie dignité de toutes les Écritures ? Rabelais, avec sa
substantifique moelle, n’en a-t-il pas donné l’une des plus plausibles définitions ?
Δ LE MANUSCRIT CATHARE DE FLORENCE
Ce manuscrit nous ouvre très concrètement la porte de la compréhension spirituelle, du sens véritable des phrases si
mal comprises des paraboles de Jésus qui concernent « le pain, le corps, le vin, le sang, manger, boire » que la très
grande majorité des Chrétiens ont compris selon la lettre, s’empêtrant dans cette définition alambiquée qu’est la
transsubstantiation et s’embarquant dans des orientations ou des incompréhensions où le Christ est accusé ou
soupçonné de préconiser une forme de cannibalisme !
LA COMPRÉHENSION CATHARE EST CELLE DE L’ESPRIT. Pour nous en persuader, suivons simplement les propos
tenus par le Parfait Pierre Authié (XIVe siècle) : « Le Pain dont le Christ avait dit dans l’Évangile : prenez-le et
mangez-en, est le Verbe de Dieu ». Suivons aussi les enseignements contenus dans le Manuscrit de Florence : « Par
pain supersubstantiel on entend la Loi du Christ qui a été donnée à tous les peuples. Et le Christ dans l’Évangile de
Jean dit : c’est mon Père qui vous donne le véritable Pain du Ciel, le Pain de Dieu, celui qui vient du Ciel et qui donne
la Vie (spirituelle et divine) au monde. Je suis le Pain vivant, (le Verbe) descendu du Ciel ; qui vient à moi n’aura plus
jamais faim ; qui croit en moi n’aura plus jamais soif. Amen, amen, je vous le dis : qui croit en moi a la Vie éternelle.
Je suis le Pain de Vie. Si quelqu’un mange de ce pain, c’est-à-dire : si quelqu’un observe mes préceptes, il vivra
éternellement. Je suis le Pain vivant descendu du Ciel et ce Pain que je vous donnerai c’est ma chair qui donne la Vie
aux Hommes. Amen, amen, je vous le dis, si vous ne mangez pas la chair du Fils de l’Homme, c’est-à-dire « si vous
n’observez pas les préceptes du Fils de Dieu » et si vous ne buvez pas de son sang, c’est-à-dire « si vous ne recevez
pas le sens spirituel du Nouveau Testament », vous n’aurez pas la Vie en vous. Celui qui mange ma chair et celui qui
boit mon sang a la Vie éternelle (« Celui qui observe mes préceptes et qui reçoit le sens spirituel du Nouveau
Testament a la Vie éternelle ») et je le ressusciterai au dernier jour ; il demeurera en Moi et Je demeure en lui » :
c’est le Salut, la réintégration de l’Être en Dieu. « Si quelqu’un met en pratique ces Paroles du Christ, l’Amour de
Dieu (Agapê) est parfait en lui ».
« SELON NOTRE FOI ». C’est de ce même Pain qu’il est écrit, selon notre foi, dans l’Évangile selon saint Matthieu :
« Pendant qu’ils soupaient,
Jésus prit du pain (c'est-à-dire : les préceptes spirituels de la Loi et des prophètes) ;
Il le bénit (c’est-à-dire : loua ces préceptes et les confirma) ;
Le rompit (c’est-à-dire : les expliqua spirituellement) ;
Le donna à ses disciples (c’est-à-dire : les leur enseigna pour qu’ils les observent spirituellement) ;
Et il leur dit : Prenez (c’est-à-dire : enseignez-les) ;
Mangez (c’est-à-dire : prêchez-les à tous) ». (Manuscrit de Florence)
Ce sont en réalité les Commandements de la Loi et des Prophètes entendus dans leur sens spirituel que nous
croyons, selon notre foi, qu’Il a désigné par ces mots : « Ceci est mon corps », ou « ma chair », comme pour dire :
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« C’est en eux que Je suis, c’est en eux que j’habite ». Et lorsque l’Apôtre, Paul, dit : « Le Calice que nous bénissons
n’est-il pas la communication du sang du Christ ? Le pain que nous rompons, n’est-il pas participation au corps du
Seigneur ? Parce que ce pain est unique, étant plusieurs nous ne sommes qu’un seul corps, car nous participons tous
de ce même Pain et de ce même Calice ; cela signifie que nous participons au même sens spirituel de la Loi, des
Prophètes et du Nouveau Testament.
Et lorsque le Christ dit : « Prenez et mangez ceci est mon corps qui va être donné pour vous », cela veut dire : « ces
préceptes spirituels des anciennes écritures sont mon corps : c’est pour vous qu’ils seront livrés (c’est-à-dire :
transmis) au peuple. Et lorsqu’il dit : « Cette coupe est la Nouvelle Alliance (le Nouveau Testament) scellée par mon
sang, faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous boirez ce sang », c’est du Pain supersubstantiel qu’il
s’agit ici (c’est-à-dire la Loi du Christ qui a été donnée à tous les peuples).
LE VERBE EST LA « CHAIR DU CHRIST » : « ET LE VERBE SE FIT CHAIR »… Il est intéressant de lire ces confirmations
dans l’Évangile de Philippe : « Qu’est-ce que la Chair du Christ ? C’est la Parole, c’est le Verbe (Logos), c’est
l’Évangile ! Qu’est-ce que le Sang du Christ ? C’est l’Esprit-Saint (Paraklétos). Celui qui accueille le Verbe et l’Esprit,
celui-là a vraiment reçu une nourriture, une boisson, un vêtement (spirituels). L’Esprit (Pneuma) anime la chair. Dans
la chair il y a aussi cette Lumière qu’est le Verbe. » (Philippe, 59, 105)
Δ LE VÉGÉTARISME CATHARE
« Fais à Dieu le voeu que jamais tu ne mangeras sciemment ou volontairement du fromage, du lait, des oeufs, ni de
la chair d’oiseau, de reptile ou de bête, prohibée par l’Église de Dieu. Car Dieu a dit : “Je vous donne toutes les
herbes portant semences, qui sont sur la surface de la terre, et tous les arbres qui ont des fruits portant semence :
ce sera votre nourriture”. »
La viande contient, selon les cathares, les mêmes contraintes physiologiques animales que celles de cet animal
qu’est aussi l’Homme : bestialité, sauvagerie, violence et appétit sexuel. La bestialité et la spiritualité sont chacune
aux extrémités opposées d’un flux soudé et inséparable de forces qui s’opposent et se repoussent mutuellement.
Consommer de la viande c’est renforcer le pôle animal de l’Homme et c’est affaiblir son pôle spirituel. C’est aussi
commettre et banaliser l’acte de tuer soit directement soit par complicité et par voies de conséquences plausibles
c’est interférer gravement dans la destinée d’une âme incarnée qui ou bien en est au stade animal ou bien est l’âme
d’un Homme incarné dans le cadre de la trajectoire de sa métempsycose.
La règle est donc très simple : « pas de viande, pas d’oeufs, pas de laitages (ni laits ni crèmes ni fromages ni
yaourts, etc.) Mais, des végétaux et du poisson ! » Tout végétal peut être consommé. Le poisson est autorisé. Il
contient les protéines animales nécessaires au métabolisme de l’être humain. Notons que le miel, qui est le nectar
des fleurs récolté par les abeilles, est un produit végétal et n’est pas un produit animal. Il tient lieu de sucre
(fructose). Il faut aussi veiller à ce que les pates à pain et à tartes ne contiennent ni oeufs ni lait. Ces pates là sont
préparées avec de l’eau et avec de l’huile. Enfin les Cathares, se fondant sur la Genèse et sur l’Évangile selon Jean
qui décrit des repas du Christ constitués de pain, de vin et de poisson, considèrent que le poisson n’est pas vraiment
un aliment carné (car l’Esprit de Dieu était, au Commencement, « au-dessus » des eaux, mais pas « dans » les eaux,
et que la chair du poisson, qui ne contient pas de sang et qui ne véhicule aucune âme, n’est pas de la viande.
Δ LA CONTINENCE SEXUELLE DES PARFAITS.
LES ÉTAPES ET LES CONTRAINTES DE LA VOIE DE L’AMOUR. « Comme les Vrais Chrétiens sont membres du Christ, il
convient que, comme leur chef Jésus-Christ, ils soient Saints, Purs, chastes et ne soient souillés d’aucun péché. Toute
personne qui prétend demeurer dans le Christ doit se conduire comme lui-même se conduisit ». (Manuscrit de
Dublin). « Bien-aimés, je vous exhorte, comme étrangers et voyageurs sur la terre, à vous abstenir des convoitises
charnelles (éros) qui font la guerre à l'âme (Agapê). » (I Pierre 2, 11) Dans l’Apocalypse, il est écrit que : « Ceux qui
ne sont pas chastes seront jetés hors de la Cité sainte ».
En d’autres termes : il n’appartient pas à l’Homme de modifier ou d’amputer la Voie de l’Amour. Il lui appartient d’y
progresser jusqu’à parvenir à son Salut, sachant qu’il ne peut s’y tenir qu’en un seul endroit : s’il séjourne à une
extrémité il ne peut pas séjourner à l’autre, et vice versa ! Cette règle s’applique exclusivement aux Parfaits et son
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observation doit correspondre à un engagement spontané, sans aucune arrière-pensée et sans aucune contrainte. Si
ces conditions ne sont pas remplies cela signifie que le « Pérégrinateur » n’a pas encore atteint l’état de Parfait et
qu’en conséquence il ne peut ni accepter ni se voir confier cette « mission » devant la communauté des Parfaits et
des autres cathares, car, au-delà de cette limite, il y aurait imposture (revoir, plus haut, page 7)
t LE CHOIX DU MOT « KATHAROS », « CATHARES »,
PAR LEURS ADVERSAIRES, FUT-IL ANODIN ?
Les historiens ont amplement démontré deux choses : (1) Les Cathares ne se sont jamais appelés eux-mêmes
« cathares » ; (2) Ce sont les adversaires catholiques des cathares qui, par dérision, leur ont attribué ce sobriquet
peut-être pour se moquer de leur prétention à atteindre pureté (katharismo), perfection, connaissance et
réintégration en Dieu.
Mais la période historique des cathares reconnus comme tels par les historiographes n’a duré que 5 siècles, de l’An
Mil à 1450. Mais les Écritures cathares que nous avons citées plus haut démontrent amplement, par leur contenu et
par leur connaissance de la finalité spirituelle du Christianisme, qu’en fait le Catharisme est un courant mystique
informel du Christianisme indissociable de ce même Christianisme et qui s’étend depuis les temps apostoliques
jusqu’à nos jours : en effet, l’histoire du Christianisme fourmille, au cours des vingt siècles écoulés des exemples de
mystiques Chrétiens en Quête de l’accomplissement des préceptes spirituels présents dans l’enseignement du
Verbe. Ces Chrétiens ont appartenu, n’ont pas appartenu, appartiennent ou n’appartiennent pas à une Ordre
particulier, à une congrégation précise, à une église temporelle catholique, protestante, orthodoxe particulière. Ils
ont été et ils sont simplement « sur la Voie ».
Aucun d’entre eux n’a cherché ni ne cherche à s’appeler « Cathare », leurs adversaires s’en sont chargés. Mais ils
savaient et ils savent que la Voie comprend des Chemins successifs, le premier d’entre eux étant celui de la Quête
sincère d’une première « Pureté ». Dans leur Quête, ils ont trouvé dans les Écritures, un premier mot qui, dans les
textes les plus anciens, était écrit en Grec : « Katharos ». Bien entendu, en Français, en Anglais, en Slavon, en
Occitan, etc., ils n’ont jamais dit « Katharos » ou « Cathare ». En Français, ils ont dit : « Pur ». Alors c’est en vain que
nous chercherions, au coeur des historiographies des siècles écoulés, le mot « Cathare » dans les écrits que ces
mystiques issus de multiples horizons, ont pu nous laisser. Mais nous verrons que le mot « Pur » est tout de même
très hautement significatif car il est le premier de toute une série d’autres mots qui, dans le Nouveau Testament, lui
sont associés et qui jalonnent de manière compréhensive le sentier caillouteux que parcourent les Pérégrinateurs.
Mais en hommage permanent à tous ceux qui par le passé ont souffert le martyre en étant appelés avec dédain :
« Cathares » !, rien ne nous empêche de continuer à appeler « Cathares » ceux qui, n’éprouvant aucun besoin de
s’affubler de quelque appellation que ce soit, si ce n’est celle d’Amis de Dieu, prouvent objectivement et avec
humilité qu’ils s’efforcent d’être authentiquement des Purs cheminant sur la Voie qui conduit à la Perfection.
Δ LE CHOIX DU MOT « KATHAROS » EST EN FAIT TRÈS PERTINENT. EN GREC, COMME DANS SES
TRADUCTIONS EN LANGAGES VERNACULAIRES. IL EST LE POINT DE DÉPART D’UNE LECTURE DU SENS
PROFOND DE L’ENSEIGNEMENT DU « CHRIST-VERBE-LUMIÈRE ».
Les Cathares en fait se nommaient eux-mêmes Chrétiens, Vrais Chrétiens, Bons Chrétiens, Amis de Dieu et, dans
leur quotidien médiéval : Bonshommes et Bonnes Dames. Si nous cherchons la raison qui a pu conduire leurs
adversaires à les nommer « Cathares », si nous éliminons l’hypothèse farfelue et malveillante des cathares
adorateurs zoophiles des chats (catus), la raison étymologique majeure est plus vraisemblablement le mot grec
« katharos » qui veut dire « pur ». Pourquoi un mot grec ? Parce que les Écritures chrétiennes, le Nouveau
Testament qui contient l’Évangile, les Épitres des Apôtres et l’Apocalypse selon saint Jean, ont de toute évidence,
lorsqu’ils ont été assemblés, été rédigées en grec qui était le langage vernaculaire le plus universel autour du bassin
méditerranéen à l’époque du Christ et des Apôtres (Ier et IIe siècles). Si nous recherchons tout d’abord le mot
katharos et ses dérivés dans un Nouveau Testament rédigé en grec, nous découvrons une fréquence élevée de leurs
occurrences. Et nous découvrons aussi que le mot katharos et ses dérivés (katharoï, katharismos, etc.) sont
associés à une série d’autres mots, toujours en grec (Katharos, Téléios, Paraklétos, Artos épiousios, Epignôsis, etc.)
qui constituent une suite logique qui s’avère être un « Fil rouge » de la Voie mystique chrétienne, c'est-à-dire le
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Chemin que le Christ-Verbe de Dieu, nous invite à suivre pour atteindre l’Éveil et pour réintégrer Dieu : « Je suis le
Chemin, la Vérité, la Vie ; nul ne va au Père que par moi. » (Jean 14,6).
Δ LES JALONS DU CHEMIN MYSTIQUE : LA SUBSTANTIFIQUE MOELLE DU CHRISTIANISME.
Ainsi les précieux jalons, bien réels et très concrets, laissés par les Cathares dans leurs Manuscrits, nous révèlent la
découverte d’un véritable cheminement spirituel, très réellement présent tout au long du Nouveau Testament,
cheminement qui, en fait, s’avère être la substantifique moelle du Christianisme. Dans l’Évangile nous lisons :
« L’Esprit souffle où il veut et tu entends sa Voix, mais tu ne sais ni d'où il vient ni où il va : ainsi en est-il de
quiconque est né de l'Esprit. La Parole de Dieu est vivante et permanente ; l’herbe se dessèche et sa fleur tombe
mais la Parole du Seigneur demeure pour l’Éternité » (Jean 3,8 et I Pierre 1, 23-25)
Théos Dieu
Logos Verbe
Christos Messie, Envoyé, Christ
Pneuma Hagios Esprit Saint
Théléma Volonté de Dieu, le Bien
Katharos, Katharismos Pur, Purification
Téléios,Téléiôsis Parfait, Perfection
Paraklétos, Paraklésis Consolateur, Enseigneur, Consolation
Artos Épiousios Pain super substantiel
Hésychia Silence, Paix profonde
Epignôsis Plénitude de la Connaissance
Philadelphia Amour fraternel, filial
Agapê Amour divin, Amour absolu
Eudokia Bonne fin, Aboutissement divin
Doxa Gloire
Basileia Ouranos Le Royaume des Cieux « qui n’est pas de ce monde »,
État de Conscience suprême
MÉTAPHYSIQUE CATHARE. Selon le Manuscrit de Dublin et d’autres sources évangéliques, cathares ou même anticathares,
nous lisons que : « Dieu saint et vrai a un peuple céleste composé de trois parties : le corps, l’âme et
l’esprit. L’âme est dans le corps. L’Esprit est le gardien et le guide de l’âme. L’esprit n’est pas dans le corps. Chaque
âme, créée par le Dieu bon, a son Esprit particulier pour la guider » (Monéta de Crémone, Adversus catharos).
Le système métaphysique cathare décrit dans le Manuscrit de Dublin confirme et complète la description faite par
Monéta de Crémone (en 1241). Ce système est le suivant : l’Être humain est composé de sept substances réparties
dans trois corps différents. Plusieurs notions ontologiques origéniennes se retrouvent dans le Manuscrit de Dublin.
Or la thèse d’Origène est de plusieurs siècles antèrieure à celles que les cathares occitans nous ont laissées dans ce
manuscrit. Elle les éclaire d’autant mieux qu’elle pourrait bien en être la source, tant les analogies sont frappantes
avec ce manuscrit qui décrit l’un des fondements essentiels de l’enseignement mystique du christianisme cathare :
le système métaphysique des sept substances et des congrégations contenues dans trois dimensions (ou corps)
physique, psychique et spirituelle, le corps, l’âme et l’esprit : ces trois dimensions constituant le trichotomisme.
ORIGÈNE ET LE PRINCIPE D’HOMOLOGIE. Ces notions se trouvent éclairées par le principe d’homologie, exposé par
Origène, en 250. Ce principe s’énonce de la manière suivante : « dans les Écritures, les choses non corporelles
(immatérielles) sont dénommées par des homologues de toutes les choses corporelles (matérielles) ». Ce principe
est l’une des clés d’une part de l’interprétation et de la compréhension du sens spirituel des Écritures du
christianisme en général, et d’autre part du Manuscrit de Dublin et de la métaphysique cathare en particulier. Ce
Principe nous aide à comprendre la place et la signification primordiales du Coeur, du Sang et du Souffle dans le
système ontologique exposé par les Cathares et présent dans l’ensemble des Écritures. Dans le corps physique ces
organes ont des fonctions physiologiques. Dans le corps psychique, le Coeur est l’Intellect ; le Sang est l’Âme et le
Souffle est la Vie. Dans le corps spirituel, le Coeur est l’Amour ; le Sang est l’Esprit et le Souffle, Pneuma est Pneuma
hagios, l’Esprit-Saint.
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Δ DEUX TRINITÉS ET SEPT SUBSTANCES.
Ainsi, nous pourrions comprendre que face à la Trinité divine qui est Une se trouve la Trinité humaine qui est
Une. De même que Dieu-Un est Amour, Verbe et Saint-Esprit, ou encore Père, Fils et Saint-Esprit, de même
l’Homme unique, Image de Dieu, dispose d’un Corps, d’une Âme et d’un Esprit. À chaque Personne de Dieu
correspond un groupe de substances de l’Homme. D’après le Manuscrit cathare de Dublin, dans la trinité humaine,
on trouve respectivement : une substance physique, trois substances psychiques et trois substances spirituelles. Les
substances physiques et psychiques vivent ensemble dans le monde de la matière, le monde du mélange, et les
substances spirituelles vivent dans la Terre Nouvelle, immatérielle, c'est-à-dire dans le Royaume des Cieux, le
Royaume de Dieu, le Royaume du Père, le « Royaume qui n’est pas de ce monde. Les substances psychiques sont, en
amont, en relation directe avec le corps physique et, en aval, en relation directe avec les substances spirituelles.
Chaque substance « garde et soutient celle qui la suit » :
A. SUBSTANCE PHYSIQUE (Physis) : (1). Le Corps charnel (Soma) (avec les fonctions physiologiques du coeur
(kardia), du sang (aima) et du souffle (pneuma).
B. SUBSTANCES PSYCHIQUES (Psyché) : (2) Le Coeur (Dianoia, l’Intellect) ; (3) L’Âme (Psukhê) et (4) La Vie (Zôé).
C’est la somme des substances qui expriment les fonctions psychiques homologues et analogues aux fonctions
physiologiques.
C. SUBSTANCES SPIRITUELLES (Noûs) : (5) L’Esprit, (Pneuma hagios) ; (6) La Visitation, l’Enseigneur, le Consolateur
(Paraklétos) et (7) L’Amour (Agapê). C’est la somme des substances qui manifestent les fonctions spirituelles
homologues et analogues aux fonctions physiques et psychiques.
AU-DELÀ EST DIEU QUI EST AMOUR.
Il n’y a là aucun mystère, aucun secret : dans le Nouveau Testament originel, en grec, chaque substance possède son
appellation propre (ci-dessus) ! Le Manuscrit de Dublin se réfère scrupuleusement à l’Évangile qui est aussi l’une des
sources du principe d’homologie d’Origène. Il y a aussi une concordance totale de cette ontologie cathare avec celle
de la Kabbale issue de l’Ancien Testament (Zohar).
Aimez-vous ardemment les uns les autres, du fond du Coeur, régénérés que vous êtes d'un germe non corruptible
mais incorruptible, par la Parole de Dieu vivante et éternelle. Car toute chair est comme l'herbe, et toute sa gloire
comme la fleur de l'herbe ; l'herbe sèche et sa fleur tombe ; mais la Parole du Seigneur demeure éternellement.
C'est cette Parole dont la Bonne Nouvelle vous a été apportée. (I Pierre 1, 23-25)
Songeons maintenant que cette Parole, a été apportée par le Verbe à tous les Hommes. De la même manière
lorsqu’un Homme reçoit l’Esprit Saint et qu’il est dès lors reconnu Parfait par ses Compagnons, ce ne sont pas des
Hommes qui le lui confèrent ni encore moins qui ont le pouvoir et qui décident de le lui conférer. Ce pouvoir et
cette décision appartiennent exclusivement à Dieu. Et Dieu n’a que faire des institutions et des castes humaines. Il
s’adresse à l’ensemble des Hommes et ne pratique ni exclusives ni ostracismes, ne serait-ce que parce qu’il est le
Père des Hommes, le Père de l’Humanité. Relisons les Paroles du Christ : « l’Esprit de Dieu souffle où il veut » ;
« Notre Père, que Ta volonté soit faite sur la Terre comme au Ciel » ; et « Dieu n’habite pas dans des maisons
faites de main d’Homme ». Le Verbe nous dit aussi qu’« il y a plusieurs demeures dans la Maison de Dieu ». Dieu
ne s’intéresse pas qu’à une catégorie d’Hommes, qu’à une seule et unique religion humaine ; Il n’a que faire des
appartenances et des non appartenances des uns et des autres : Il est Dieu de tous les Hommes et de toutes les
Religions. Alors en ces temps de Renouveau et de Reviviscence de notre Quête cathare, attendons-nous à
rencontrer un jour d’authentiques Parfaits dans une Religion ou dans une autre, dans une Philosophie ou dans une
autre, dans une non religion ou dans une autre… simplement chez des Êtres humains qui, ayant cherché Dieu avec
Vérité, ont fini par le retrouver et par être admis à nouveau auprès de Lui, sachant que l’Esprit de chacun fera, à
l’issue d’une vie ou d’une autre en « ce monde », son Retour à Dieu.